Samedi prochain marquera la fin de l’opération Mare Nostrum. L’opération de surveillance et de sauvetage en mer Méditerranéee, lancée il y a un an par l’Italie, devrait être remplacée dès le 1er novembre par une nouvelle opération, baptisée Triton et placée cette fois-ci sous la responsabilité de Frontex, l’agence de surveillance des frontières extérieures de l’Union européenne.
Le problème est que l’opération Triton sera uniquement une opération de surveillance des frontières, sans mandat de sauvetage. Elle opèrera près des eaux territoriales italiennes et pas au-delà, où ce serait pourtant le plus nécessaire. L'agence Frontex elle-même a déclaré que l'opération Triton n'avait pas les ressources permettant d’assurer le mandat de Mare Nostrum.
Cela pourrait avoir des conséquences catastrophiques en mer Méditerranée et entraîner le décès de milliers de migrants qui fuient la guerre et les persécutions au Moyen-Orient et en Afrique. En 2013, 63% des entrées irrégulières par voie maritime ont été le fait de personnes venant de Syrie, d'Érythrée, d'Afghanistan et de Somalie, des pays ravagés par des conflits et des violations des droits humains de grande ampleur.
L’Europe se barricade toujours davantage, construit des murs barbelés à ses frontières terrestres et va laisser mourir en mer encore plus de femmes, d’hommes et d’enfants. Elle se décharge ainsi d’une obligation pourtant inscrite dans le droit de la mer: celle des sauver des vies en péril sur ses eaux territoriales. Bien sûr, l’opération Mare Nostrum coûte très cher à l’Italie, près de 9 millions d’Euros par mois. Mais l’Union européenne a dépensé ces dernières années plus de 2 milliards pour des systèmes de surveillance sophistiqués, et seulement 700 millions à l'amélioration de la situation des demandeurs d'asile et des réfugiés sur son territoire.
Il est urgent que les pays de l’Union européenne et la Suisse se montrent solidaires avec l’Italie et cherchent ensemble des solutions. Les politiques actuelles d'immigration et les pratiques de contrôle aux frontières empêchent des réfugiés d'accéder à la procédure d'asile en Europe et mettent en danger la vie de toutes ces personnes, qui se retrouvent obligées d’entreprendre des voyages de plus en plus dangereux.
La responsabilité de la mort de celles et ceux qui essaient de rejoindre l'Europe est une responsabilité collective. Les tragédies humaines auxquelles on assiste chaque jour en Méditerranée et aux frontières de l'Europe ne sont pas une fatalité, elles sont évitables. Pour autant qu’on cesse de faire passer la protection des frontières avant la protection des vies humaines.