Les «Charlie» du Moyen-Orient

Opinion signée par Manon Schick, directrice de la Section suisse d’Amnesty International, parue le 25 février 2015 dans Lausanne-Cités.
Chaque vendredi, le jeune bloggeur saoudien Raif Badawi attend dans sa cellule, la peur au ventre. Il a reçu 50 coups de bâton une première fois en janvier, et devrait subir les 950 autres ces prochains mois, à raison de 50 coups chaque vendredi. Son «crime» ? Il a créé une plateforme de discussion sur internet et critiqué les autorités et l’islam tel qu’appliqué en Arabie Saoudite.

Manon Schick Par Manon Schick, directrice d’Amnesty International Suisse. © Valérie Chételat

Raif n’est pas le seul prisonnier d’opinion, ni dans son pays, ni au Moyen-Orient, où l’on recense malheureusement des centaines de femmes et d’hommes emprisonnés uniquement parce qu’ils ont fait usage de leur liberté d’expression. Ces militants dérangent les régimes répressifs, qui les musellent en les jetant en prison.

Le cas de Raif est devenu emblématique de cette répression scandaleuse, mais aussi le symbole de la mobilisation en faveur de la liberté d’expression à travers le monde. Des milliers de personnes ont signé des pétitions et ont organisé des manifestations, notamment à Lausanne chaque samedi matin. Plusieurs gouvernements, dont la Suisse, ont clairement critiqué la peine encourue par Raif.

La pression est efficace : les autorités ont renvoyé le cas de Raif devant la Cour suprême et la peine de 50 coups de bâton a été annulée semaine après semaine, d’abord pour des raisons médicales – Raif ne serait pas en état de subir les coups – puis sans raisons explicites. Le gouvernement saoudien espère sans doute que la mobilisation s’essouffle.

La femme de Raif, réfugiée avec leurs trois enfants au Canada, s’est dite très touchée par ce soutien mondial à son mari et nous a demandé de ne pas baisser les bras avant d’avoir obtenu la libération de Raif et des autres prisonniers d’opinion en Arabie Saoudite. Peut-elle compter sur vous aussi ?