Droits des femmes L’hypocrisie de la Chine sur les droits des femmes

Opinion signée par Manon Schick, directrice de la Section suisse d’Amnesty International, parue le 29 septembre 2015 dans le journal 24 Heures.
Dimanche dernier à New York, devant des dirigeants du monde entier, le président chinois Xi Jinping ouvrait une réunion en faveur de l’égalité des genres et l’autonomisation des femmes. Ce sommet marquait le vingtième anniversaire de la conférence de Pékin sur les droits des femmes.

Par Manon Schick, directrice de la Section suisse d’Amnesty International. © Valérie Chételat

Dans son discours, le président s’est bien gardé d’évoquer la situation des militantes en faveur des droits des femmes dans son propre pays. Et pour cause ! Il n’allait pas se vanter du fait que les autorités chinoises maintiennent actuellement en détention au moins onze militantes et qu’elles en ont persécuté des dizaines d’autres depuis son arrivée au pouvoir. Ces deux dernières années, la Chine a mis fin aux activités de trois organisations non gouvernementales défendant les droits des femmes.

Il est particulièrement hypocrite de la part du président Xi Jinping d’utiliser la scène internationale pour proclamer l’importance des droits des femmes pendant que les autorités chinoises continuent à jeter en prison celles qui luttent pour ces mêmes droits. Certes, la Chine a réalisé des progrès considérables en matière de réduction de la pauvreté et d’accès à l’éducation pour les femmes et les filles, mais ces progrès sont gravement compromis par les actes d’intimidation, les manœuvres de harcèlement et les incarcérations dont sont victimes des militantes des droits humains.

Su Changlan, une ex-institutrice de 44 ans originaire du sud de la Chine, encourt 15 ans de prison pour « incitation à la subversion de l’État ». Elle a milité pour mettre fin à la violence contre les femmes et aux mariages précoces et forcés, et aidé des victimes de la politique coercitive de planification familiale en Chine. Wang Yu, avocate de renom qui a combattu le harcèlement sexuel subi par des écolières, a été arrêtée au début du mois de juillet dans le cadre d’une opération de répression sans précédent contre les avocats en Chine. Elle est détenue dans un lieu secret.

En mai, la journaliste indépendante Gao Yu a été condamnée à sept ans de prison pour «divulgation de secrets d’État», sur la base d’accusations complètement infondées. Et les autorités chinoises n’ont toujours pas obligé qui que ce soit à rendre des comptes pour la mort en détention de Cao Shunli, survenue en mars dernier. Elle était en prison depuis septembre 2013, lorsque la police de Pékin l’avait empêchée de se rendre à Genève pour assister à un programme de formation en matière de droits humains.

Le signal le plus clair que pourrait donner le président Xi Jinping pour montrer que la Chine défend les droits des femmes serait de libérer immédiatement les militantes emprisonnées. Les autorités chinoises doivent travailler avec elles, pas contre elles.