Et pourtant, rien de «durable» là-dedans. Les enquêtes menées par Amnesty International dans cinq plantations de palmiers à huile en Indonésie montrent de graves violations des droits humains: des femmes forcées à travailler des heures supplémentaires sous peine de voir leur salaire réduit; des enfants, âgés de huit ans pour les plus jeunes, faisant un travail dangereux et difficile physiquement; des ouvriers souffrant de sérieuses lésions liées au paraquat, un pesticide hautement toxique, produit par l’entreprise suisse Syngenta et encore utilisé dans les plantations malgré son interdiction dans de nombreux pays.
Ces plantations appartiennent à Wilmar, le premier producteur mondial d’huile de palme, qui fournit des multinationales agroalimentaires et ménagères telles que Nestlé, Colgate-Palmolive ou encore Unilever. Ces entreprises ferment les yeux sur l’exploitation de travailleurs et travailleuses dans leur chaîne d’approvisionnement. Elles font pourtant partie de la Table ronde pour une huile de palme durable, un organisme créé en 2004 à Zurich pour assainir ce secteur après plusieurs scandales environnementaux.
Mais notre enquête montre clairement que les entreprises se cachent derrière la Table ronde pour éviter une surveillance accrue. Ces entreprises affichent certes une politique rigoureuse sur le papier, mais aucune n’a pu prouver qu’elle avait identifié des risques évidents d’atteintes aux droits humains dans la chaîne d’approvisionnement de Wilmar.
Ce nouvel exemple de violations des droits fondamentaux par des multinationales démontre que les mesures volontaires prises par les entreprises, y compris par Nestlé, pour surveiller les conditions de production, sont insuffisantes. Il faut des règles contraignantes, qui ne dépendent pas du bon vouloir des firmes. Les gouvernements doivent adopter des lois pour que les entreprises soient tenues de protéger les droits humains et l’environnement dans l’ensemble de leurs relations d’affaires.
La population suisse sera appelée à se prononcer sur cette question, car une large coalition d’ONG, dont Amnesty International, a déposé en octobre dernier l’initiative pour des multinationales responsables. Il est grand temps que nous puissions nous fier à l’appellation «durable» sur les étiquettes et que nos gestes quotidiens ne contribuent pas à l’exploitation de travailleurs ailleurs sur cette planète.