© Amnesty International (Xavier Gil Dalmau)
© Amnesty International (Xavier Gil Dalmau)

Opinion L’Europe ne doit pas imiter la politique migratoire de Trump

Opinion signée par Manon Schick, directrice de la Section suisse d’Amnesty International, parue dans le 24 heures, le 31 janvier 2017.
Lors de sa deuxième semaine à la Maison Blanche, Donald Trump a décidé de fermer les frontières pendant plusieurs mois à tous les réfugiés ainsi qu'aux ressortissants de sept pays musulmans.

Par Manon Schick, directrice d’Amnesty International Suisse. © Valérie Chételat

Signé vendredi soir, son décret anti-immigration interdit l'entrée aux États-unis à tous les réfugiés, quelle que soit leur origine, pendant 120 jours (de façon indéfinie pour les réfugiés syriens), ainsi qu'à tous les ressortissants de sept pays à majorité musulmane pendant 90 jours: Iran, Irak, Libye, Somalie, Soudan, Syrie et Yémen.

Le décret est clairement discriminatoire sur la base de critères nationaux et religieux, et il ne saurait être justifié par la prévention d’attentats. Disproportionnée et inapte à faire baisser la menace terroriste, la mesure a immédiatement été contestée par des milliers de manifestants à Washington, New York, Boston et dans d'autres villes des États-Unis. Alors que la toile s’agitait sous le slogan #MuslimBan.

Les autorités canadiennes et britanniques ont d’ores et déjà obtenu un allègement du décret pour leurs résidents naturalisés ou permanents originaires de l’une de ces sept pays. Le ministre canadien de l'immigration, Ahmed Hussen, d’origine saoudienne, a même annoncé qu’il accorderait des permis de résidence temporaire aux ressortissants des sept pays musulmans visés par le décret américain qui seraient bloqués au Canada.

Il est important que les capitales occidentales demandent des comptes à Washington pour un décret dont la mise en œuvre tourne dès à présent au grotesque, mais qui n’en demeure pas moins effrayant. Il est tout aussi fondamental qu’elles se montrent exemplaires.

Au lieu de cela, les pays européens ferment la route des Balkans ainsi que leurs frontières, et ne respectent pas leurs engagements en matière de relocalisation en Europe. L’Union européenne a en outre signé un accord avec la Turquie qui a pour conséquence directe que des milliers de réfugiés, dont un important nombre de Syriens, sont actuellement bloqués dans les îles grecques par des températures glaciales et totalement dépourvus d’équipement adéquat pour y faire face.

Les dirigeants européens doivent mettre sur pied un plan efficace d’aide aux réfugiés et conclure avec la Turquie un véritable accord fondé sur le partage des responsabilités et le respect du droit international. Amnesty Suisse demande au Conseil fédéral de faire venir au plus vite les 600 réfugiés en provenance de Grèce, qu’il s’est engagé à accueillir en 2015, et à augmenter ce contingent. L’organisation demande également à la Suisse d’offrir à la Grèce l’aide adéquate pour gérer les procédures d’asile, afin que les réfugiés soient accueillis avec dignité en Grèce continentale dans la perspective d’une relocalisation ailleurs en Europe.