En Suisse aussi, des personnes qui viennent en aide aux réfugiés se retrouvent devant la justice, traitées comme des criminelles. Norbert Valley, pasteur neuchâtelois, avait offert un toit à un Togolais sans statut légal et a été condamné à 1000 francs d’amende. La Vaudoise Flavie Bettex avait sous-loué un studio à un requérant d’asile iranien à l’aide d’urgence, avec l’autorisation de l’établissement vaudois d’accueil des migrants, et a été traduite en justice, puis finalement acquittée.
Dernier exemple en date, le 10 décembre dernier, journée du 70e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme: Anni Lanz, militante de 72 ans, a été condamnée par un tribunal de Brigue à payer 800 francs d’amende et 1400 francs de frais de procédure. Son «crime»? «Avoir fait entrer illégalement un Afghan en Suisse», dit la justice.
En fait, c’est plus compliqué que cela. Anni Lanz avait rencontré ce jeune à Bâle, et avait tout de suite constaté qu’il souffrait de graves problèmes psychiques. Quand la Suisse l’a renvoyé en Italie, en vertu du système de Dublin, le requérant afghan s’est retrouvé à dormir dans la rue, par moins 15 degrés. Anni s’est rendue sur place et a constaté qu’il n’y avait aucune possibilité de prise en charge pour lui. Il avait déjà les doigts gelés. Elle a décidé de le ramener avec elle en Suisse et a été arrêtée à la frontière.
Un «délit de solidarité»? Mais dans quel monde vivons-nous où la solidarité envers les personnes vulnérables est punie par la justice, au même titre que les passeurs qui s’enrichissent sans scrupules sur le dos des migrants? Où les organisations qui font du sauvetage en mer sont victimes d’une campagne de diffamation sans précédent de la part du gouvernement italien et n’ont plus d’autre choix que de renoncer?
Les nombreux messages et offres de soutien reçus par Norbert, Flavie ou Anni montrent l’indignation de beaucoup de citoyens suisses. En cette période de fêtes, il est nécessaire de rappeler haut et fort que la solidarité est la preuve même de notre humanité. Que les enfants nés sur un bateau de sauvetage méritent autant notre compassion que ceux qui naissent dans une étable, entre un bœuf et un âne gris. Qu’ils auraient besoin de chaleur humaine, comme celle que nous partageons avec nos proches le jour de Noël. Et que la loi ne devrait jamais interdire la solidarité.