Ce contingent infime est grotesque. Grotesque en rapport aux 13'000 personnes qui, du jour au lendemain ont été jetées hors des abris et des installations sanitaires dont elles disposaient, perdant le peu de choses qu’il leur restait. Grotesque étant donné la capacité d’accueil des pays européens, à commencer par la Suisse qui, à elle seule, pourrait accueillir ces 13’000 réfugiés. En 2015 encore, près de 40'000 personnes déposaient une demande d’asile dans notre pays, contre 14'000 seulement l’an dernier.
En plus d’être quasi nul, le geste politique européen, complété par l’envoi de matériel humanitaire en Grèce, est celui du pompier pyromane. Car c’est bien la politique d’asile européenne qui a provoqué la situation actuelle à Moria. Une politique qui considère qu’il est acceptable d’endiguer les personnes en quête d’asile à la périphérie de l’UE ou aux abords immédiats de ses frontières, en sous-traitant leur maintien hors d’Europe à des États comme la Libye ou la Turquie. Non seulement l’UE a barricadé l’accès à des procédures d’asile sur sol européen, mais elle n’est même pas capable d’offrir un abri décent aux milliers de personnes qu’elle recale ainsi à ses confins. L’incendie de Moria en offre une preuve accablante.
Face à cette architecture européenne de l’asile ultra restrictive et démissionnaire, les revendications des milieux de défenses des réfugiés et des droit humains semblent ne pas peser lourd dans la balance. Il s’agit, à court terme, d’accueillir de plus grands contingents de réfugiés, notamment en provenance de Grèce et, à plus long terme, de réformer la politique d’asile européenne en lui redonnant une substance humaniste. Des revendications qui rejoignent les demandes de citoyens ou d’entités locales. En effet, en juin déjà, plus de 50'000 personnes et 132 organisations demandaient l’évacuation des camps de la mer Égée et l’accueil d’un important contingent de réfugiés. Et, la semaine passée, plusieurs villes de Suisse se sont déclarées prêtes à accueillir des réfugiés en provenance de Moria, demandant au Conseil fédéral d’organiser au plus vite leur venue. Nous attendons du Conseil fédéral qu’il y réponde autrement que par l’envoi de quelques tentes et l’accueil d’une poignée de personnes.