Côte d'Ivoire Un rapport d'Amnesty International révèle les crimes commis en toute impunité après l’arrestation de Laurent Gbagbo

Les forces de sécurité gouvernementales et une milice soutenue par l’État ont crée, en Côte d’Ivoire, un climat de peur qui empêche des centaines de milliers de personnes déplacées suite aux ...

Laurence Banjneron et son mari Jean-Pierre Pehe, on été tués par les FRCI le 11 mai 2011 dans le village deToulepleu. © Amnesty International

Les forces de sécurité gouvernementales et une milice soutenue par l’État ont crée, en Côte d’Ivoire, un climat de peur qui empêche des centaines de milliers de personnes déplacées suite aux violences post-électorales de retourner chez elles, affirme Amnesty International dans un rapport publié le 28 juillet 2011.

Le rapport intitulé Insécurité et personnes déplacées en Côte d’Ivoire : une crise persistante, décrit comment les homicides et les attaques commises par les forces de sécurité gouvernementales (FRCI) et une milice composées de Dozos (chasseurs traditionnels) à l’encontre de personnes ciblées en raison de leur appartenance ethnique empêchent les personnes déplacées de quitter la sécurité toute relative offerte par les sites qui les accueillent de manière temporaire.

«Cette impasse qui empêche plus d’un demi-million de personnes de regagner leurs foyers ne peut plus être tolérée», a déclaré Gaëtan Mootoo, chercheur d’Amnesty International sur l’Afrique de l’Ouest.
Selon lui, «les autorités doivent mettre en place une chaîne de commandement bien établie et démanteler les milices qui, malgré la fin du conflit, continuent de propager la peur parmi les populations».

Le rapport d’Amnesty International montre comment les forces de sécurité gouvernementales (FRCI) et les Dozos continuent de perpétrer des homicides et de prendre pour cible des personnes uniquement en raison de leur appartenance ethnique, même après l’investiture du Président Alassane Ouattara.

Les Dozos semblent prendre pour cible notamment le groupe ethnique des Guérés qui sont considérés comme des partisans de l’ancien Président Laurent Gbagbo. Les hommes jeunes et costauds courent plus particulièrement le risque d’être la cible d’attaques, car ils sont présumés avoir été membres des milices pro-Gbagbo.

À Duékoué, dans le quartier Carrefour, où des centaines de civils ont été tués à la fin du mois de mars 2011, quelques Guérés ont osé retourner chez eux. Ceux qui ont regagné leur maison ont raconté à Amnesty International que des combattants dozos armés roulaient désormais fréquemment à moto sur la rue principale du quartier. Un habitant a déclaré à Amnesty International: «Ils n’ont pas besoin de faire autre chose. Ils n’ont même pas besoin de descendre de leur moto. Le simple fait de venir ici aussi souvent avec leurs armes suffit pour nous maintenir dans la crainte. C’est ce qu’ils veulent.»

Amnesty International est particulièrement préoccupée par le «rôle de maintien de la sécurité» que les forces officielles (FRCI) ont confié aux Dozos. Des Dozos armés assurent la surveillance de postes de contrôle sur les routes principales de l’ouest de la Côte d’Ivoire, dissuadant ainsi les personnes déplacées de retourner chez elles.

«La liberté avec laquelle les Dozos agissent désormais montre que leur comportement est toléré ou est même encouragé par les FRCI», a déclaré Gaëtan Mootoo. «Le Président Ouattara et le Premier ministre Guillaume Soro doivent s’atteler à créer une force de sécurité impartiale qui puisse assurer la protection de tous les citoyens ivoiriens quel que soit le groupe ethnique auquel ils appartiennent», a-t-il ajouté.

Durant les mois de violences qui ont suivi l’élection présidentielle contestée en Côte d’Ivoire, des violations graves des droits humains, y compris des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre, ont été commises aussi bien par les forces loyales à Alassane Ouattara que par celles fidèles à Laurent Gbagbo.

Amnesty International appelle le Président Ouattara à mettre en place, de manière urgente, un plan d’action global permettant de rétablir la sécurité dans l’ensemble du territoire, afin de créer les conditions d’un retour sûr et durable dans leurs foyers des personnes déplacées et des réfugiés. Cela doit inclure un programme efficace de désarmement, de démobilisation et de réinsertion des milices et autres forces irrégulières.

Étant donné que les forces de sécurité et les Dozos commettent actuellement des violations des droits humains, Amnesty International salue la décision de l’ONUCI d’établir huit camps militaires dans l’ouest du pays afin de remplir de manière plus efficace leur mandat de protection de la population civile. «Les graves conséquences de cette récente vague d’insécurité et de déplacements de populations doivent être rapidement résolues, sinon elles porteront atteinte aux efforts de réconciliation menés dans un pays déchiré par une décennie de conflits ethniques et violents», a affirmé Gaëtan Mootoo.

Voir le rapport «Insécurité et personnes déplacées en Côte d’Ivoire : une crise persistante»

Communiqué de presse publié le 28 juillet 2011, Londres / Lausanne.
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