Depuis 18 mois, un mouvement proteste contre l’ingérence présumée du gouvernement dans les affaires islamiques. Les manifestations se sont déroulées majoritairement sans violence. Cependant, à quatre reprises au moins, les forces de sécurité auraient recouru à une force excessive contre les manifestants. Si quelques faits isolés de violence impliquant des manifestants sont avérés, ils semblent s’inscrire dans le cadre d’un recours excessif à la force par la police.
«Nous sommes vivement préoccupés par les informations en provenance d’Éthiopie faisant état de nouvelles arrestations de manifestants musulmans. La répression qu’orchestre le gouvernement éthiopien contre la liberté d’expression et le droit de manifester pacifiquement doit prendre fin sans délai», a indiqué Claire Beston, chercheuse sur l’Éthiopie au sein d’Amnesty International.
Deux versions des faits contradictoires
Concernant les événements de Kofele, les manifestants et le gouvernement livrent des versions des faits très divergentes. Selon les manifestants, les forces de sécurité ont ouvert le feu sur des personnes non armées qui protestaient contre l’arrestation de membres de la communauté musulmane locale. Les autorités auraient quant à elles affirmé que les manifestants étaient armés, ce qui a déclenché une flambée de violence.
«Il importe que soit menée sans délai une enquête indépendante et impartiale sur les évènements de Kofele, a estimé Claire Beston. D’autres manifestations étant prévues, il faut examiner minutieusement le comportement des forces de sécurité et, si suffisamment d’éléments recevables démontrent que des infractions ont été commises, poursuivre leurs auteurs présumés.»
D’autres informations font état de nombreuses arrestations à Kofele et aux alentours, , ainsi qu’à Addis-Abeba au cours de la semaine dernière. Deux journalistes, Darsema Sori et Khalid Mohamed, ont notamment été interpellés en début de semaine à Addis-Abeba. Les deux hommes travaillaient pour Radio Bilal, qui rend régulièrement compte du mouvement de protestation. Ils sont actuellement poursuivis au titre de la Loi relative à la lutte contre le terrorisme.
Violation du droit d’association
Malgré plusieurs mois de manifestations pacifiques de grande ampleur, le gouvernement a dépeint à plusieurs reprises le mouvement comme violent et proche des milieux terroristes. Selon des informations parvenues à Amnesty International, des messages diffusés la semaine dernière via les médias officiels ont averti que les autorités feraient preuve d’une grande fermeté face à quiconque tenterait de participer à de nouvelles manifestations.
«Il s’agit d’une violation du droit de manifester pacifiquement, que protège la Constitution éthiopienne, a déploré Claire Beston. Le gouvernement continue de réagir aux revendications de la communauté musulmane en recourant à la violence et aux arrestations arbitraires afin de poursuivre en justice les membres du mouvement.»
Alors que les manifestations se poursuivent, Amnesty International craint que les droits humains ne continuent d’être bafoués – arrestations arbitraires de manifestants pacifiques notamment et nouvelles effusions de sang. Elle exhorte le gouvernement éthiopien à respecter le droit de ses citoyens de manifester pacifiquement et à cesser de recourir à des méthodes brutales. Toutes les personnes privées de liberté uniquement pour avoir exercé leur droit de manifester pacifiquement doivent être libérées immédiatement.
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