À Nairobi, 400 familles ont été expulsées en mai 2013 à l'aide de munitions et de gaz lacrymogènes. © AI
À Nairobi, 400 familles ont été expulsées en mai 2013 à l'aide de munitions et de gaz lacrymogènes. © AI

Kenya Légiférer pour faire cesser les expulsions forcées

7 octobre 2013
L'État kényan doit immédiatement arrêter les expulsions tant que des garanties légales n'ont pas été mises en place pour protéger les droits humains des milliers d'habitants de bidonvilles et de quartiers informels qui sont concernés, a déclaré Amnesty International.

«Près de la moitié des habitants de Nairobi vivent dans des bidonvilles et nombre d'entre eux risquent d'être expulsés de force ; non seulement les expulsions jettent souvent les gens à la rue, sans abri, mais en outre elles peuvent s'accompagner de violences et entraîner la perte de l'accès à des services tels que l'eau et l'assainissement, aux moyens de subsistance, à l'éducation et aux soins, a dit Iain Byrne, responsable de l'équipe Droits économiques, sociaux et culturels d'Amnesty International.

«We are like rubbish»

Pour marquer la Journée mondiale de l'habitat, un nouveau rapport d'Amnesty International intitulé We are like rubbish in this country décrit la vie quotidienne dans les bidonvilles de Nairobi et ce qu'implique être expulsé de force. Le rapport porte sur deux quartiers d'habitat précaire, Deep Sea et City Carton.

À City Carton, près de l'aéroport Wilson, les logements de 400 familles ont été démolis en mai 2013 par des groupes d'hommes armés de marteaux, de pieds-de-biche et de machettes. Les policiers présents sur les lieux pendant les opérations ont fait usage de gaz lacrymogènes et de balles réelles.

Absence de fondement juridique

Amnesty International a également constaté que les démolitions de logements à City Carton ne reposaient sur aucun fondement juridique, et que la police n'a rien fait pour arrêter les opérations ni pour protéger les habitants contre les hommes armés.

«En laissant ces hommes détruire des habitations à City Carton la police a manqué à son devoir de protéger les habitants, et en faisant usage d'une force qui n'était pas nécessaire elle a effectivement donné son assentiment à l'opération d'éviction», a indiqué Iain Byrne.

Précarité et vulnérabilité des expulsés

Cinq mois après les démolitions, des centaines de personnes dorment toujours dans des abris de fortune et leurs conditions de vie déjà précaires ont nettement empiré. À ce jour elles se sont vu refuser les recours et l'assistance judiciaires auxquels elles ont légalement droit.

Le rapport d'Amnesty International met aussi l'accent sur la vulnérabilité des communautés comme celle de Deep Sea, dans le quartier de Westlands. Les logements et les sources de revenus des habitants de Deep Sea risquent fort d'être démolis pour laisser la place à une route qui traversera le principal marché du bidonville.

Le projet de construction de la route conçu par l'Autorité de la voirie urbaine du Kenya (KURA) est en train de se concrétiser, financé en partie par l'Union européenne. En l'absence d'informations réelles sur le projet de route, les résidents craignent à tout moment de se retrouver à la rue.

Des lois sont nécessaires

La Constitution du Kenya reconnaît spécifiquement le droit à un logement convenable. Cela étant, au vu de l'ampleur et de la fréquence des expulsions forcées au Kenya, il faut de toute urgence adopter des lois qui prohibent explicitement ces mesures.

«Les normes internationales relatives aux droits humains sont sans équivoque : les expulsions forcées sont contraires à la loi, elles ne se justifient jamais et elles constituent une atteinte grave au droit au logement, sans parler des autres droits tels que le droit à la vie, à l'alimentation, à la santé et à l'assainissement», a dit Iain Byrne.