Ce document, intitulé CAR: Human rights crisis spiralling out of control, souligne l’ampleur sans précédent des violations des droits humains perpétrées à travers le pays par la Seleka, la coalition de groupes armés ayant lancé une offensive contre l’ancien président, Francois Bozizé, au début du mois de décembre 2012, avant de saisir le pouvoir en mars 2013.
«Les forces de la Seleka s’en prennent aux civils à travers le pays, procédant à des exécutions, recourant à la torture, bombardant sans discrimination des zones habitées, violant des femmes et enrôlant des enfants de force», a indiqué Godfrey Byaruhanga, spécialiste de la République centrafricaine à Amnesty International.
Crimes contre l'humanité
«Le désespoir de la population est plus profond que jamais du fait de ces atteintes persistantes et de grande ampleur aux droits humains, qui sont susceptibles de constituer des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité.»
Un haut responsable gouvernemental a déclaré à Amnesty International, lors d’une visite récente, que les ministres qui n’étaient pas à la tête de factions de la Seleka éprouvent des difficultés à prévenir ces graves violations des droits humains, et que même le président Michel Djotodia n’était pas habilité à donner d’ordres aux forces de la Seleka ne relevant pas de sa propre faction.
Anciens délinquants et enfants soldats
La coalition de la Seleka a semble-t-il recruté d’anciens délinquants, violents pour beaucoup d’entre eux, notamment des voleurs de grand chemin et des braconniers. Elle compterait par ailleurs parmi ses rangs des combattants soudanais et tchadiens, qui sont soupçonnés d’avoir commis de nombreuses violations des droits humains en République centrafricaine.
On estime que le nombre d'enfants soldats au sein de la Seleka pourrait s’élever à 3 500 ; certains ont été recrutés au Soudan et au Tchad voisins. Amnesty International est extrêmement préoccupée par le fait que nombre de ces mineurs soient utilisés comme monnaie d’échange par des commandants étrangers qui attendent d’être payés par le gouvernement centrafricain pour leur rôle dans le conflit.
Responsabilités des autorités
Amnesty International demande aux autorités centrafricaines : de condamner publiquement et sans équivoque l’ensemble des violations des droits humains perpétrées par les forces de sécurité et les groupes armés ; de traduire les responsables présumés en justice et d’accorder des réparations aux victimes.
«L’Union africaine, qui préside au déploiement de troupes africaines en République centrafricaine, a déclaré en juillet 2013 qu’elle enverrait quelque 3 500 soldats protéger les civils ; or, le contingent actuellement sur place représente moins de la moitié de ce chiffre. Il serait en outre largement insuffisant dans un pays dont la superficie est plus de deux fois supérieure à celle de la France», a ajouté Godfrey Byaruhanga.
Organisations internationales inquiètes
Les Nations unies réfléchissent actuellement à la possibilité d’intervenir pour prendre les rênes des opérations de maintien de la paix en République centrafricaine. Amnesty International demande aux Nations unies de soutenir et de former les soldats chargés du maintien de la paix afin qu’ils soient en mesure de faire respecter l'ordre, et de déployer des observateurs des droits humains dans tout le pays.
Inquiètes au sujet de la terrible situation qui règne en République centrafricaine, de nombreuses délégations des Nations unies, de l'Union africaine et de l'Union européenne, ainsi que d'autres gouvernements étrangers, se sont rendues dans le pays depuis que le président Bozizé a été chassé du pouvoir en mars 2013. Amnesty International craint cependant que ces différents acteurs n’harmonisent pas suffisamment leur action, ni les uns avec les autres, ni avec les autorités nationales.