Zimbabwe Libertés fondamentales menacées par les élections

12 juillet 2013
Au Zimbabwe, la police multiplie les manœuvres d’intimidation ciblant les défenseurs des droits humains à l’approche des élections qui doivent avoir lieu fin juillet, écrit Amnesty International  dans un nouveau rapport.

Ce document, intitulé Walk the Talk, révèle que la police effectue des descentes systématiques dans les bureaux, saisit des équipements et arrête de manière arbitraire des défenseurs des droits humains, en vue de les intimider et de perturber le travail des organisations qui défendent les droits fondamentaux en lien avec les élections. «Le durcissement contre le travail des défenseurs des droits humains est un indicateur inquiétant de l’hostilité active que manifestent les agences gouvernementales à l’égard de la société civile, a indiqué Noel Kututwa, directeur adjoint du programme Afrique d’Amnesty International. Les forces de sécurité zimbabwéennes doivent respecter et protéger les libertés fondamentales, tandis que le pays se prépare à une élection dont les enjeux sont majeurs fin juillet.»

Fin 2012, dans un climat de spéculation quant à la possibilité que le Zimbabwe organise des élections dès le mois de mars 2013, Amnesty International a recensé une multiplication des mesures de harcèlement ciblant les défenseurs des droits humains et les organisations de la société civile. Depuis novembre 2012, les policiers ont effectué au moins cinq descentes dans des bureaux d’ONG et arrêté illégalement des dizaines de militants des droits humains. Beaucoup d’entre eux comparaissent devant les tribunaux pour des accusations forgées de toutes pièces, largement considérées comme ayant un caractère politique.

Les finances des ONG mises à mal

Bien que les poursuites engagées contre les défenseurs des droits humains ne débouchent pas nécessairement sur des condamnations, elles paralysent le travail des organisations du fait des comparutions répétées de leurs dirigeants devant les tribunaux, des frais de justice élevés qui assèchent les finances et de la peur d’être incarcérés à long terme. En outre, Amnesty International a observé un soutien clairement partisan des hauts responsables des services de sécurité du pays, qui ont ouvertement prêté allégeance au parti du président Robert Mugabe, l’Union nationale africaine du Zimbabwe-Front patriotique (ZANU-PF).

«Un tel comportement, inacceptable, est expressément interdit par la nouvelle Constitution du Zimbabwe, a poursuivi Noel Kututwa. Au regard d’un passé marqué par les violences cautionnées par l’État, cela ne peut que générer la peur parmi la population, particulièrement parmi les communautés qui ont vécu de graves violations des droits humains lors du scrutin de 2008.» En effet, avant le second tour de l’élection présidentielle de juin 2008, au moins 200 personnes avaient été tuées, et des milliers torturées et frappées, dans le cadre d’une vague de violence politique qui avait submergé le pays, souvent avec l’assentiment ou la participation active de la police, de l’armée et des services de renseignements.

Agences gouvernementales sous surveillance?

Afin de résoudre la crise politique qui avait sévi à la suite des violences électorales, la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) était intervenue, puis l’Accord politique global avait été signé en septembre 2008. Amnesty International invite la SADC et l’Union africaine (UA), en tant que co-garantes de cet accord, à prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir la non-répétition des violences cautionnées par l’État lors des élections harmonisées du 31 juillet.

Il convient d’envoyer des observateurs afin qu’ils rendent précisément compte des violations des droits humains, notamment celles imputables aux agences gouvernementales, et de faire publiquement savoir que ces agissements ne seront pas tolérés. «Les enjeux de cette élection sont très importants et les parties concernées au Zimbabwe, pas plus que la communauté internationale, ne peuvent faire comme si de rien n’était pendant la période pré-électorale, a estimé Noel Kututwa. «Après avoir promulgué une nouvelle Constitution en mai, le gouvernement zimbabwéen doit joindre le geste à la parole en honorant les engagements qui y sont inscrits et en protégeant les libertés fondamentales de ses citoyens.»