Un camp de fortune à Port-au-Prince, en 2012.
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Selon des informations recueillies par Amnesty International, certaines familles n’avaient pas été notifiées de l’expulsion et ont été chassées de leurs tentes par des policiers accompagnés d’un groupe d’hommes armés de machettes et de marteaux.
Suze Mondésir, membre du comité du camp, a raconté leur calvaire : «Vers 10 heures du matin, des policiers sont arrivés au camp. Ils nous insultés et ont commencé à démolir nos tentes. Les hommes nous bousculaient et les policiers agitaient leurs pistolets devant nous pour nous dissuader de réagir.»
Les femmes ont été particulièrement affectées par cette expulsion car elles ont non seulement perdu leur logement et leurs effets personnels, mais également leurs petits commerces. Cléane Étienne, une résidente du camp Fanm Koperatif, a déclaré : «Ils renversé d’un coup de pied le pot de café que je m’apprêtais à vendre. C’était mon gagne-pain. Maintenant il me faut de l’argent pour recommencer.»
Une autre femme a indiqué : «Non seulement nous avons perdu nos affaires, mais nous avons en outre dû acheter du bois et des bâches pour reconstruire des abris, parce que nous n'avons nulle part où aller.»
Quelques jours avant l’expulsion, les résidents avaient organisé une conférence de presse afin de dénoncer l'inaction des autorités face à leur situation. Ils pensent qu’il est possible que les autorités aient procédé à l’expulsion en représailles.
Une pratique illégale mais fréquente
Plus tôt, des représentants des autorités municipales et de l’Agence de protection civile ont procédé à l’expulsion forcée d’environ 600 familles hors du camp de la place Sainte-Anne, également à Port-au-Prince. Les résidents du camp ont été informés de l’expulsion à peine cinq jours à l'avance et se sont vu promettre 20 000 gourdes (environ 350 euros) par famille. Cependant, d’après le Groupe d’appui aux refugiés et rapatriés, une organisation locale, 250 familles n'ont toujours pas reçu cette somme. Le jour de l’expulsion, aucune des familles n’a eu le temps de rassembler ses affaires avant que son abri ne soit détruit.
«Ces expulsions sont un nouveau traumatisme pour les personnes vivant dans ces camps de fortune, à qui le tremblement de terre a déjà tout pris. En ne leur accordant même pas le temps de récupérer leurs affaires et en les mettant à la rue, les autorités bafouent la dignité des victimes du séisme», a déploré Javier Zúñiga, conseiller spécial auprès d’Amnesty International.
«Il faut à tout prix éviter de forcer ces personnes à quitter les camps, et il convient de mener une véritable consultation et de fournir des logements de remplacement adéquats avant qu’une expulsion n’ait lieu», a résumé Javier Zúñiga.