Le 8 avril 2018, Liu Xia a pu avoir une conversation téléphonique de sept minutes avec Liao Yiwu, un écrivain chinois exilé en Allemagne, lors de laquelle elle a déclaré qu’elle était préparée à mourir si le gouvernement chinois ne l’autorisait pas à quitter le pays. Liu Xia a pleuré tout au long de la conversation et a déclaré: «Maintenant, je n’ai plus rien à craindre. Si je ne peux pas partir, je mourrai chez moi. Xiaobo est parti, et je n’ai plus rien. Il est plus facile de mourir que de vivre. Utiliser la mort pour les défier ne pourrait pas être plus simple pour moi.»
En plus d’avoir partagé l’enregistrement, Liao Yiwu a écrit un article – publié le 2 mai 2018 sur le site internet consacré aux droits humains China Change (chinachange.org), basé aux États-Unis – révélant que les autorités chinoises avaient promis à de nombreuses reprises à Liu Xia qu’elle pourrait quitter le pays et se faire soigner pour sa dépression. Des agents de la Sûreté de l’État auraient d’abord dit à Liu Xia d’attendre la fin du 19e Congrès du Parti communiste en octobre 2017. Puis, une fois cette date passée, les agents lui ont dit d’attendre la fin des sessions annuelles de l’Assemblée nationale populaire et de la Conférence consultative politique du peuple chinois, qui se sont terminées en mars 2018.
L’état de santé mentale de Liu Xia continue d’inquiéter ses ami·e·s et les militant·e·s. Parallèlement, les autorités allemandes et américaines ont renouvelé à plusieurs reprises leurs appels demandant que Liu Xia soit autorisée à se rendre à l’étranger. Liu Xia est en résidence surveillée illégale depuis que son défunt mari, Liu Xiaobo, a reçu le prix Nobel de la paix en 2010. Elle est toujours surveillée et confrontée à des restrictions depuis la mort de ce dernier, le 13 juillet 2017.
Complément d'information
L'artiste et poétesse Liu Xia est en résidence surveillée illégale depuis que son défunt mari, Liu Xiaobo, a reçu le prix Nobel de la paix en 2010. À la suite de l’annonce de la remise du prix le 8 octobre 2010, des policiers ont emmené Liu Xia dans la province du Liaoning pour la tenir éloignée des médias et pour rendre visite à Liu Xiaobo en prison.
Liu Xiaobo est décédé le 13 juillet 2017 des suites d’une défaillance organique. Ses funérailles et la dispersion de ses cendres en mer, organisées à la hâte, ont eu lieu deux jours plus tard, le 15 juillet. Liu Xia et d’autres membres de la famille y ont assisté. Cependant, Liu Xia n’était pas présente lors de la conférence de presse que les autorités ont tenue plus tard dans la journée.
Amnesty International a obtenu confirmation par la suite que Liu Xia avait été emmenée en «vacances» forcées par des agents de la Sûreté de l'État au Yunnan, dans le sud-ouest de la Chine. Elle connaissait des gens sur place, mais les autorités ne lui ont permis de parler à personne. Depuis lors, Liu Xia a été ramenée à Pékin, mais elle est toujours étroitement surveillée par des agents de la Sûreté de l'État et ses amis les plus proches n’arrivent pas à la joindre.
Le 18 août, une courte vidéo a été mise en ligne sur YouTube. Liu Xia y déclarait qu'elle se rétablissait et qu'elle souhaitait avoir du temps pour pleurer son époux. Une autre vidéo mise en ligne plus tard, dans laquelle on pouvait voir, dans une semi-pénombre, une personne vêtue comme Liu Xia, a alimenté les craintes que ces images aient été filmées sous la contrainte.
En 2017, selon des informations relayées par Radio Free Asia, Liu Xia a subi une opération destinée à lui retirer des fibromes utérins (excroissances non cancéreuses dans l'utérus). Au-delà des préoccupations pour sa santé physique, sa santé mentale suscite toujours des inquiétudes, car on craint que sa dépression ne soit « extrêmement grave ». L’année dernière, une lettre que Liu Xia a écrit à Herta Müller, lauréate allemande du prix Nobel de littérature en 2009, a été publiée sur Internet. Dans cette lettre, Liu Xia partage son anxiété constante : «Je ne peux pas partir. Je parle toute seule. Je vais devenir folle». Elle ajoute : «Je n'ai pas le droit de parler, de parler fort. Je vis comme un légume. Je gis comme un cadavre.»
Liu Xia aurait raconté à des amis que lors d’une visite à son mari le 10 octobre 2010, qui a duré une heure, celui-ci avait éclaté en sanglots, avant de dédier son prix Nobel de la paix à toutes les personnes qui ont sacrifié leur vie dans la lutte non violente pour la paix, la démocratie et la liberté. Le jour même, Liu Xia a été raccompagnée à Pékin. Depuis lors, elle a été maintenue prisonnière à son domicile ou à d’autres endroits, et placée sous surveillance 24 heures sur 24.
Il y a cinq ans, le 12 juin 2013, Liu Xia a envoyé une lettre ouverte au président chinois Xi Jinping pour protester contre son assignation à résidence illégale et contre la condamnation le même mois de son frère, Liu Hui, à 11 ans d'emprisonnement pour fraude – accusation considérée par certains comme une nouvelle forme de persécution à l’égard de la famille de Liu Xiaobo. Les familles de Liu Xiaobo et de Liu Xia sont également constamment surveillées.
En janvier 2014, Liu Xia a fait une crise cardiaque et une pathologie cardiaque lui a été diagnostiquée, mais les autorités l’ont empêchée de recevoir le traitement qui lui est nécessaire. Liu Xia souffre par ailleurs d'une grave dépression. On craint que son état ne se soit aggravé, car à son maintien en réclusion sont venues s’ajouter la mort de son père en septembre 2016, de sa mère en avril 2017 et de son mari en juillet 2017. Les membres de la famille des défenseurs des droits humains en détention sont souvent soumis à une surveillance policière, à des actes de harcèlement et à des restrictions de leur droit de circuler librement.