Zarganar.
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«Cette libération de prisonniers politiques doit être saluée, mais ne signifie en aucun cas que les récentes promesses de réformes politiques au Myanmar aient été tenues», a déclaré Benjamin Zawacki, expert d’Amnesty International pour le Myanmar. «A moins que le nombre de personnes libérées augmente sensiblement, cette mesure restera symbolique et signifiera plutôt l’abandon des efforts entrepris pour réformer le système politique».
Depuis fin 2007, quelque 2’000 personnes ont été emprisonnées pour des motifs politiques au Myanmar. La moitié d'entre elles en raison de leur participation pacifique à la «révolution safran» au cours de l’année. Parmi les personnes libérées aujourd’hui figure Zarganar, le célèbre comique birman pour lequel la Section suisse d’Amnesty International a demandé sans relâche une libération inconditionnelle.
«La nouvelle de la libération de Zarganar est fantastique ! Des milliers de personnes se sont mobilisées en Suisse et dans le monde pour que cela soit possible. Cela prouve que s’engager pour les droits humains paie», a déclaré le comique Yann Lambiel qui s’est engagé au côté d’Amnesty International pour la libération de son homologue birman.
«Mais l’amnistie d’aujourd’hui ne suffit pas à distinguer le nouveau gouvernement militaire du précédent», a déclaré Benjamin Zawacki. «Si les autorités du Myanmar souhaitent sérieusement démontrer leur volonté de procéder à des réformes, la libération des prisonniers aujourd’hui ne doit être que la première étape vers une libération immédiate et sans conditions de tous les prisonniers politiques ».
Si les autorités ont des raisons de croire que les prisonniers politiques ont commis des délits reconnus, ils doivent être jugés dans les meilleurs délais, dans le cadre d’un procès équitable. Dans le cas contraire, ces prisonniers doivent être libérés sans conditions et sans délai.
Au Myanmar, les prisonniers politiques sont régulièrement accusés en vertu de lois aux contours vagues, servant les préoccupations de sécurité ou d'ordre public, et laissant aux autorités une marge d’interprétation excessive.
«Libérer des prisonniers politiques est une mesure positive, mais la réforme de l’appareil répressif et de sécurité est attendue depuis longtemps », a déclaré Benjamin Zawacki. Amnesty International appelle les autorités du Myanmar à mettre immédiatement un terme à la répression menée contre les opposants politiques.
Complément d’information
En janvier 2011, devant le Conseil des droits de l'homme des Nations unies, les autorités du Myanmar ont nié maintenir en détention des prisonniers politiques, affirmant que toutes les personnes incarcérées étaient des délinquants. En août 2011, le ministre de l’Intérieur du Myanmar, le lieutenant-général Ko Ko, aurait déclaré au rapporteur spécial des Nations-unies sur la situation des droits de l’homme au Myanmar que « plus de 100 détenus » considérés comme des prisonniers d'opinion avaient commis des infractions pénales.
Parmi les autres prisonniers d’opinion libérés mercredi 12 octobre figure le comique Zarganar, incarcéré en juin 2008 pour son action humanitaire au lendemain du passage du cyclone Nargis.
Htay Kywe, un prisonnier d’opinion auquel Amnesty International a parlé quelques heures à peine avant qu’il ne soit arrêté en octobre 2007, purge actuellement une peine de 64 ans de prison dans une cellule de 2,4 mètres sur trois à la prison de Buthidaung, à plus de 1 000 kilomètres de son domicile à Yangon. Il a été torturé en prison. On ne sait pas encore s’il fait partie des détenus libérés mercredi 12 octobre 2011.