Beaucoup de journalistes et de professionnels des médias font l’objet de menaces et d’agressions au Pakistan, en particulier lorsqu’ils enquêtent sur des violences impliquant les forces de sécurité, les groupes politiques ou les insurgés. Au moins six journalistes ont été tués depuis janvier 2011.
Amnesty International prie les autorités pakistanaises de veiller à ce qu’une enquête approfondie soit menée sans tarder sur les circonstances ayant entouré les violences commises contre les journalistes, et à ce que les responsables présumés soient jugés au cours de procès équitables, conformes aux normes internationalement reconnues en matière de droits humains. Alors même que le simple citoyen, au Pakistan, est de plus en plus préoccupé par le maintien de l’ordre dans son pays, les partis politiques et les autorités pakistanaises doivent faire comprendre que les auteurs de violations des droits humains ne sont pas au-dessus des lois.
Meurtres, enlèvements et représailles
En mai, le journaliste d’investigation Saleem Shahzad a été retrouvé mort dans une région isolée du Pendjab, quelques jours après avoir disparu alors qu’il se trouvait devant sa maison à Islamabad. Son corps présentait des signes de torture. L’année dernière, il avait dit à des confrères qu’il craignait pour sa vie parce qu’il avait laissé entendre dans ses rapports qu’Al Qaïda avait infiltré les forces armées pakistanaises.
Amnesty International a été encouragée d’apprendre que la commission gouvernementale d’enquête sur la mort de Saleem Shahzad a reçu plusieurs témoignages de professionnels des médias et d’agents de renseignements civils et militaires. Il reste cependant à voir si les autorités vont enquêter de manière approfondie sur les puissants services de renseignement du Pakistan qui, en grande partie, ne sont soumis à aucun contrôle.
Le dimanche 14 août 2011, le journaliste Munir Ahmed Shakir a été abattu par des inconnus à Khuzdar, dans le Baloutchistan, une région du Pakistan d’où Amnesty International reçoit régulièrement des informations faisant état de violations des droits humains, notamment de disparitions forcées et d’exécutions extrajudiciaires. Les confrères de Munir Ahmed Shakir affirment que cet homicide avait pour but de dissuader les journalistes de rendre compte de la situation extrême qui règne dans la région en matière de droits humains.
Jeudi 11 août 2011, le journaliste Rehmatullah Dawar a été enlevé par des inconnus alors qu’il faisait ses courses dans sa ville d’origine, Miran Shah, dans le Waziristan-Nord. Journaliste expérimenté, réputé pour l’équité et l’objectivité de ses articles, Rehmatullah Dawar était l’un des rares journalistes à rendre compte du conflit qui oppose les talibans et les forces internationales dans la zone tribale du Waziristan-Nord.
Personne n’a revendiqué son enlèvement, et on ignore où il se trouve. Il est à craindre cependant qu’il n’ait été enlevé par les forces de sécurité pakistanaises ou par des talibans locaux qui ont déjà été impliqués dans des enlèvements et des exécutions extrajudiciaires au cours d’opérations militaires dans le nord-ouest du pays.
D’autres journalistes, membres du syndicat tribal des journalistes – dont Rehmatullah Dawar était le vice-président – craignent pour leur avenir et se sentent incapables de réagir puisqu’ils ne peuvent pas protester contre l’enlèvement de leur confrère par crainte de représailles des militaires et des talibans.