Les 7 et 8 octobre à Genève, le Comité des droits de l'homme des Nations unies doit déterminer dans quelle mesure le Sri Lanka a respecté les droits inscrits au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, traité crucial en la matière. Il s'agit de la première évaluation de ce type depuis 2003.
«Plus de dix ans après la dernière évaluation du bilan du Sri Lanka par le Comité, il est alarmant de voir qu'un si grand nombre des problèmes relatifs aux droits humains soulevés à l'époque restent d'actualité dans ce pays, et de constater que le gouvernement ne s'y est pas attaqué, contrairement à ce qu'il avait promis. Le Sri Lanka continue à invoquer des lois draconiennes pour museler l'opposition. Le recours à la torture et aux disparitions forcées continue en toute impunité, de même que les atteintes à la liberté d'expression et d'association. Les autorités sri-lankaises doivent en outre rendre des comptes pour les agressions visant les minorités religieuses, qui sont en hausse», a déclaré David Griffiths, directeur adjoint du programme Asie-Pacifique d'Amnesty International.
«Les autorités sri-lankaises ont promis à maintes reprises de se préoccuper de questions pressantes en matière de droits humains, mais elles ne passent quasiment jamais aux actes. L'évaluation menée par le Comité est l'occasion pour la communauté internationale de souligner ce décalage, et de pousser le gouvernement à prendre de véritables mesures.»
Un passé teinté de massacres
La nature et l'ampleur des violations de droits humains commises au Sri Lanka ont connu de forts changements depuis la dernière évaluation, en 2002. Le pays est passé d'un cessez-le-feu prolongé à un conflit armé intensif avec les Tigres libérateurs de l'Eelam tamoul. Les combats ont pris fin en 2009 et la période d'après-conflit est marquée par de graves violations des droits humains.
Comme Amnesty International le précise dans le dossier qu'elle a soumis au Comité des droits de l'homme, le gouvernement sri lankais continue à utiliser la Loi relative à la prévention du terrorisme pour arrêter et incarcérer des personnes sans respecter les droits de la défense, et pour réduire l'opposition au silence. Cette Loi contribue à la persistance de la torture et des autres formes de mauvais traitements en détention et doit être abrogée.
Des lois pour renforcer le pouvoir du président
Parallèlement, le gouvernement du président Mahinda Rajapaksa a profité de la 18e modification de la Constitution du Sri Lanka pour renforcer son pouvoir, en fragilisant l'indépendance de la justice et d'organes importants pour la protection des droits fondamentaux –comme la Commission nationale des droits humains. «La 18e modification doit être annulée. Elle a supprimé certains dispositifs permettant d'encadrer le pouvoir exécutif et a dans les faits retiré toute influence à certaines institutions tout en les soumettant au bon vouloir du président», a déclaré David Griffiths.
Malgré les dénégations officielles et les promesses d'amélioration de la situation lors de la dernière évaluation du Sri Lanka par le Comité des droits de l'homme, le problème endémique de la torture et des mauvais traitements persiste dans les centres de détention du pays. Amnesty International a reçu de nombreuses informations selon lesquelles d'anciens détenus affirment avoir été victimes d'actes de torture, parfois sexuelle, dans des centres de détention administrés par la police, l'armée ou les services du renseignement.
Le gouvernement sri lankais a nié utiliser la torture de manière systématique dans le pays, et a refusé d'enquêter sur les nombreux éléments attestant le recours à cette pratique ou d'amener les responsables présumés à rendre des comptes.