Ce document, intitulé El tiempo pasa, la impunidad permanece, se penche sur le fait que les autorités espagnoles refusent d'enquêter sur des dizaines de milliers d'homicides et de «disparitions» commis durant la Guerre civile par les deux parties au conflit et sous le régime de Francisco Franco (1936-1975). En outre, elles refusent de coopérer avec les pays, comme l'Argentine, qui mènent leurs propres investigations sur les violations des droits humains commises en Espagne durant cette période de l'histoire.
«Le fait que l'Espagne s'abstienne d'enquêter et de coopérer aux procédures liées aux crimes commis durant la Guerre civile par les deux parties au conflit et sous le régime de Franco est un affront pour tous les proches des victimes dont les droits humains ont été bafoués ou qui ont disparu à cette époque», a indiqué Esteban Beltrán, directeur de la section espagnole d'Amnesty International. «Nous constatons une tendance à clore ces affaires sans pousser plus avant les investigations, mais la situation a empiré récemment, depuis que la Cour suprême a statué que les juges espagnols n'étaient pas compétents pour connaître de ces crimes. La seule voie d'enquête judiciaire possible en Espagne semble être condamnée.»
La justice espagnole refuse de diligenter des enquêtes et les plaintes déposées par les victimes sont classées sans suite. En novembre 2008, la Haute Cour espagnole a déclaré qu'elle n'était pas compétente pour entendre de la plainte pénale déposée en 2006 pour les homicides et les 114 266 disparitions forcées commises en Espagne entre 1936 et 1951, préférant inciter les tribunaux régionaux à s'en charger.
Amnistie et prescritption
Depuis lors, Amnesty International a constaté que sur les 47 affaires renvoyées devant des tribunaux régionaux, au moins 38 ont été classées sans suite. Le 27 février 2012, la Cour suprême espagnole a statué qu'il était impossible d'enquêter sur les crimes commis durant la Guerre civile et sous le régime de Franco, faisant valoir, entre autres arguments, qu'ils sont couverts par la Loi d'amnistie et font l'objet d'un délai de prescription.
Par ailleurs, l'Espagne empêche les victimes de témoigner devant le juge argentin responsable d'une affaire jugée dans ce pays depuis 2010; le Bureau du procureur général d'Espagne refuse de coopérer dans le cadre de cette affaire. Amnesty International exhorte les autorités espagnoles, en particulier le Bureau du procureur général, à enquêter sur les crimes ou infractions relevant du droit international et à engager les poursuites qui s'imposent, et à satisfaire pleinement aux demandes de coopération émanant de tribunaux étrangers qui décident d'enquêter sur ces crimes.