Sarah Mardini et Seán Binder sur une photo de 2018 © Fahrinisa Campana/PRI's The World
Sarah Mardini et Seán Binder sur une photo de 2018 © Fahrinisa Campana/PRI's The World

Grèce «Traîné en justice pour avoir distribué des bouteilles d’eau»

Communiqué de presse du 9 janvier 2023, Londres, Berne – Contact du service de presse
À la veille du procès le 10 janvier des sauveteurs Seán Binder et Sarah Mardini, Amnesty International appelle de nouveau les autorités grecques à abandonner toutes les accusations portées contre eux. Ils font l'objet d'accusations iniques et sans fondement, uniquement pour avoir aidé des personnes réfugiées et migrantes qui risquaient de se noyer en mer.

Seán, plongeur-sauveteur qualifié, et Sarah, réfugiée syrienne et militante dont l'histoire a inspiré le film Netflix Les Nageuses, comparaissent devant le tribunal avec 22 personnes de l'ONG de recherche et de sauvetage au sein de laquelle ils étaient bénévoles. «Si je peux être traîné en justice pour n’avoir fait guère plus que distribuer des bouteilles d’eau et des sourires, alors tout le monde peut se retrouver dans la même situation. Ce procès n’est pas celui de Sarah et de moi, ni même celui de nos 22 coaccusés. Il s’agit pour les autorités grecques de broyer toute compassion et d’empêcher les gens de rechercher la sécurité. Mais j’ai confiance en la justice, elle prévaudra, et nous pourrons poursuivre le cours de nos vies», a déclaré Seán Binder.

Nils Muižnieks, directeur pour l'Europe à Amnesty International, a déclaré : «Sarah et Seán ont fait ce que chacun d’entre nous devrait faire si nous étions dans leur position. Aider des gens qui risquent de se noyer sur l’un des itinéraires maritimes les plus mortels vers l’Europe et les aider sur le littoral n’est pas un crime. Ce procès révèle que les autorités grecques sont prêtes à tout pour décourager l'aide humanitaire et dissuader les migrant·e·s et les réfugié·e·s de rechercher la sécurité sur les côtes du pays – ce que nous constatons dans un certain nombre d’États européens. Il est grotesque que ce procès ait même lieu. Toutes les charges contre les sauveteurs doivent être abandonnées sans délai.»

«Aider des gens qui risquent de se noyer n’est pas un crime.»
Nils Muižnieks, directeur pour l'Europe à Amnesty International

Après avoir été arrêtés en août 2018, Sarah et Seán ont passé plus de 100 jours en prison avant d’être libérés sous caution. Le procès qui se profile porte sur des délits, notamment espionnage et usage de faux, passibles d’une peine de prison pouvant aller jusqu’à huit ans.

En outre, Sarah et Seán font l’objet d’une enquête pour des accusations infondées de trafic d’êtres humains, fraude, appartenance à une organisation criminelle et blanchiment d’argent ; ces infractions sont passibles d’une peine maximale de 20 ans d’emprisonnement. L’enquête est ouverte depuis plus de quatre ans et depuis, leur vie est en suspens.

Complément d’information

Sarah Mardini, originaire de Syrie, est arrivée à Lesbos en 2015 en tant que réfugiée. Lorsque le moteur du bateau sur lequel elle se trouvait est tombé en panne, Sarah et sa sœur Yusra ont sauvé 18 passagers en tirant l’embarcation, qui était en train de couler, jusqu’à un lieu sûr. Yusra a par la suite nagé dans l’Équipe olympique des réfugiés. L’histoire des deux sueurs a inspiré le film Netflix Les Nageuses. Sarah est retournée en Grèce en 2016 et a fait du bénévolat au sein d’une organisation grecque de recherche et de sauvetage, où elle a rencontré Seán. Elle vit et étudie aujourd’hui à Berlin.

Seán Binder, citoyen allemand qui a grandi en Irlande, est un plongeur-sauveteur qualifié qui a passé du temps à secourir des migrant·e·s et des réfugié·e·s dans la mer à Lesbos, en Grèce, l’un des principaux points d’entrée en Europe. Il travaille actuellement à Londres.

Ce procès, qui doit se tenir le 10 janvier devant la Cour d’appel d’Égée-Septentrionale, sur l’île de Lesbos, a déjà été ajourné en novembre 2021 pour des raisons de procédure. On s’attend à ce qu’il dure des semaines, voire des mois.