« Seule une enquête internationale est susceptible d’être considérée comme impartiale et crédible par tous les groupes touchés. Elle est indispensable au rétablissement d’une paix durable et de l’état de droit dans le pays, a déclaré Maisy Weicherding, spécialiste de l’Asie centrale à Amnesty International.
« Une enquête impartiale est nécessaire pour garantir que les éléments témoignant d’atteintes aux droits humains soient recueillis et protégés sans délai et que l’obligation de rendre des comptes soient respectée. Les responsables présumés des crimes commis au cours de la semaine écoulée doivent être identifiés et conduits devant la justice. »
Amnesty International est préoccupée par les informations indiquant que des membres des forces de sécurité ont tenté de confisquer des vidéos et des photos prises par des journalistes locaux et des habitants qui ont gardé une trace des violences. Ces informations s’ajoutent à des allégations de complicité des forces de l’ordre dans certaines des violations commises.
Dans un cas en particulier, des hommes armés et masqués affirmant être membres des forces de sécurité se seraient rendus au domicile d’un défenseur des droits humains, dans la ville de Bazar Korgan, et auraient exigé que son épouse leur remette son appareil photo et les éléments qu’il avait recueillis au sujet d’atteintes aux droits humains. Selon certaines sources, lorsqu’elle a refusé de suivre leurs ordres, ils ont tiré sur le portail de la maison.
« Les militants des droits humains et les journalistes indépendants jouent un rôle important dans la mise en évidence des atteintes aux droits humains. Les autorités kirghizes ont le devoir de les protéger », a souligné Maisy Weicherding.
Les violences meurtrières au Kirghizistan auraient commencé par des affrontements entre bandes rivales de jeunes kirghizes et ouzbeks, le 10 juin 2010. Ces affrontements ont rapidement dégénéré en attaque de grande ampleur contre les quartiers majoritairement ouzbeks d’Och et, plus tard, de Djalal-Abad et des villes et villages voisins, avec des incendies, des pillages et des agressions violentes, dont des homicides.
Ces événements ont poussé des milliers de familles ouzbèkes à fuir leur domicile. Elles vivent désormais dans des camps improvisés ou se cachent dans des zones isolées du pays, sans aide humanitaire.
« Le gouvernement intérimaire du Kirghizistan doit réagir immédiatement aux allégations de complicité des forces de sécurité et faire clairement comprendre que toutes les atteintes aux droits humains donneront lieu à des poursuites, a ajouté Maisy Weicherding.
« Selon les autorités kirghizes, les forces de sécurité ont repris le contrôle des zones de conflit. Cependant, l’état de droit ne peut être rétabli dans le pays que s’il est accompagné de l’obligation de rendre des comptes.
« Pour cela, il faut que les autorités kirghizes demandent et facilitent une enquête internationale sur les violentes attaques qui ont eu lieu. Elles doivent aussi prendre des mesures pour protéger les militants des droits humains et les journalistes indépendants, car ils jouent un rôle essentiel dans toute enquête indépendante et impartiale. »