Intitulé Confronting the circle of injustice: Threats and pressure faced by lawyers in the North Caucasus, ce document traite du harcèlement que subissent les avocats pénalistes dans le Caucase du Nord. Dans cette région de la Fédération de Russie, la violence des groupes armés et la réponse brutale des autorités engendrent de graves violations des droits humains.
«Les avocats russes ont le devoir de protéger les droits de leurs clients face à la justice pénale chargée de prononcer des condamnations. En s’acquittant de leur devoir envers leurs clients, ils s’exposent fréquemment à des risques considérables pour eux-mêmes», a déclaré John Dalhuisen, directeur du programme Europe et Asie centrale d’Amnesty International.
La torture est fréquemment utilisée en Russie en vue d’obtenir des «aveux». Les avocats qui tentent de dissuader leurs clients de plaider coupables et contestent les violations des droits de leurs clients sont perçus comme des obstacles à la bonne marche de la justice, plutôt que comme des garants incontournables de son bon fonctionnement. «Hélas, les avocats dans le Caucase du Nord qui luttent pour les droits de leurs clients sont souvent en butte à l’intimidation, aux menaces, parfois aux violences physiques, pouvant aller jusqu’à la mort, tandis que les responsables de l’application des lois qui sont derrière ces attaques jouissent de l’impunité.»
Le Caucase du Nord, région de la Fédération de Russie qui se compose de six républiques – la Tchétchénie, le Daghestan, l’Ingouchie, la Kabardino-Balkarie, la Karatchaïévo-Tcherkessie et l’Ossétie du Nord – ainsi que le territoire administratif de Stavropol, sont le théâtre d’attaques menées par des groupes armés contre les représentants de la loi, les agents des administrations locales, des personnalités éminentes et des membres de la population.
Les autorités russes sont tenues de garantir la sécurité de la population locale dans le respect de l’Etat de droit et des droits humains. Cependant, de nombreux cas de torture et de mauvais traitements imputables à des responsables de l’application des lois ont été signalés. D’autres allégations font état de disparitions forcées et d’exécutions illégales. Si les autorités russes ne mènent pas d’enquêtes efficaces sur ces affaires, l’Etat de droit s’en trouvera affaibli.
Dans le contexte actuel, les avocats ont un rôle essentiel à jouer, en tant que représentants des victimes d’atteintes aux droits humains et garants de l’équité des procès pour les personnes accusées d’appartenir à des groupes armés ou de se livrer à des activités criminelles. « Pour le détenu, l’avocat est souvent le seul contact avec le monde extérieur qui puisse attester qu’il a subi des actes de torture et tenter de faire valoir ses droits, a commenté John Dalhuisen.
Le rapport publié le 21 mars présente une série de cas dans lesquels les avocats ont subi des mauvais traitements ; dans l’un de ces cas, l’avocat est mort.
Des avocats transformés en victimes
En 2010, Sapiat Magomedova, avocate au Daghestan, a été frappée par des policiers alors qu’elle se rendait au poste de police pour voir son client. Après avoir porté plainte et insisté pour que ces faits fassent l’objet d’une enquête impartiale, elle a elle-même été inculpée de charges pénales.
L’avocat Omar Saïdmagomedov et son cousin ont été tués par des membres des forces de sécurité le 20 janvier 2012 dans une rue de Makhachkala, au Daghestan. Les autorités ont affirmé avoir tué deux membres d’un groupe armé. Toutefois, les confrères d’Omar Saïdmagomedov affirment qu’il s’agit d’une exécution extrajudiciaire; ils sont eux-mêmes victimes de harcèlement en lien avec les efforts qu’ils déploient pour découvrir la vérité.
«Les avocats qui représentent les victimes de violations des droits humains imputables aux agents de la force publique sont confrontés au même problème que leurs clients: l’absence de recours judiciaires efficaces qui leur permettraient de voir les responsables identifiés et traduits en justice», a indiqué John Dalhuisen.
«Les autorités russes doivent veiller à ce que les avocats soient protégés et libres de s'acquitter sans crainte de leurs activités professionnelles. Elles doivent traduire en justice tous les auteurs présumés de violences et d’atteintes aux droits humains visant les avocats. Enfin, elles doivent faire en sorte qu’ils soient en mesure de défendre leurs clients sans entrave.»
Communiqué de presse publié le 21 mars 2013, Londres / Lausanne.
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