Valentina Cherevatenko © AI
Valentina Cherevatenko © AI

Bonne nouvelle Abandon des poursuites contre une défenseure des droits humains

19 octobre 2017
La Russe Valentina Tcherevatenko était accusée de violation de la Loi relative aux «agents de l’étranger». Les poursuites pénales engagées à l'encontre de cette éminente défenseure des droits humains ont été abandonnées. Amnesty International s’était mobilisée pour elle avec une action urgente.

Les poursuites pénales engagées à l'encontre de la défenseure russe des droits humains Valentina Tcherevatenko pour violation de la Loi relative aux «agents de l’étranger» ont été abandonnées le 19 juin au motif que les éléments du crime n’étaient pas établis. Elle n'a pas été informée de cette décision et l'a appris par hasard plus d'un mois après.

Valentina Tcherevatenko est une éminente militante, fondatrice et présidente de Women of the Don Union (l’Alliance des femmes du Don), une ONG de défense des droits humains, et également présidente de Women of the Don Foundation for Civil Society Development (la Fondation des femmes du Don pour le développement de la société civile).

Elle risquait deux ans de prison

Le 2 juin, Valentina Tcherevatenko avait été inculpée de «soustraction avec intention délictueuse aux obligations imposées par la loi» au titre de la Loi relative aux «agents de l’étranger».

L'organisation Women of the Don Union et son organisation affiliée, Women of the Don Foundation for Civil Society Development avaient été désignées comme des «agents de l'étranger» par le ministère de la Justice le 27 octobre 2015. La loi relative aux «agents de l’étranger» impose aux ONG russes de s'enregistrer en tant qu'«organisations exerçant les fonctions d'agents de l'étranger» si elles reçoivent des financements étrangers et prennent part à des «activités politiques», définies en des termes vagues. La loi oblige les ONG désignées comme des «agents de l'étranger» à apposer cette appellation sur tous leurs documents publics, à communiquer certaines informations et à se soumettre à d'autres obligations onéreuses. Les deux ONG ont respecté ces exigences. Le 29 février 2016, le ministère de la Justice a officiellement retiré l’organisation Women of the Don Union du registre des «agents de l'étranger».

Depuis l'adoption de la loi relative aux «agents de l'étranger» en 2012, de nombreuses ONG ont été soumises à des inspections intrusives de la part des autorités et ont dû faire face à des procédures judiciaires laborieuses. Plus de 100 ONG ont été inscrites au registre des «agents de l'étranger». Cependant, Valentina Tcherevatenko est la première dirigeante d'une ONG à avoir fait l'objet de poursuites pénales au titre de la loi relative aux «agents de l'étranger», ce qui créé un précédent dangereux. Si elle avait été condamnée, Valentina Tcherevatenko aurait risqué jusqu'à deux ans d'emprisonnement.

«Absence d'éléments établissant le crime»

Le 24 juillet, un avocat de Piatigorsk, dans le Caucase du Nord, avait reçu une réponse à sa requête concernant l'affaire Valentina Tcherevatenko. La réponse du Département du bureau du procureur général du Caucase du Nord, en date du 14 juillet, affirmait que l'affaire avait été classée le 19 juin. Des collègues d'Amnesty International Suède avaient diffusé une réponse similaire que l'un de leurs militants avait reçue à peu près au même moment.

Ni Valentina Tcherevatenko ni son avocat n'avaient été informés par les autorités russes de l’abandon des poursuites.  Ils ont d'abord pensé que c'était une rumeur sans fondement, d'autant que le 19 juin, précisément la date à laquelle l'affaire a été classée, Valentina Tcherevatenko et son avocat assistaient à une réunion avec un enquêteur qui avait précédemment travaillé sur l'affaire, sur un sujet n'ayant aucun rapport. Celui-ci leur a dit qu'il n’était pas au courant de l’évolution de l'affaire et était surpris qu’elle n’ait pas encore été présentée devant les tribunaux. Ils n'ont pas non plus reçu d'information du dernier enquêteur en charge de l’affaire. Par conséquent, lorsque l’abandon des poursuites a été annoncé, leur première réaction a été de douter.

L'avocat de Valentina Tcherevatenko s'est rendu à Piatigorsk et, le 31 juillet, il est parvenu à obtenir une copie officielle de la décision de classer l'affaire. Cette décision citait l'«absence d'éléments établissant le crime» comme motif pour abandonner les charges retenues contre elle et clore le dossier. En d'autres termes, les autorités ont reconnu que Valentina Tcherevatenko n'avait pas commis l'infraction dont elle était accusée.

Cet abandon des poursuites est une grande nouvelle, non seulement pour Valentina Tcherevatenko, mais aussi pour la société civile russe dans son ensemble, et elle fait naître l'espoir d'un changement positif. Valentina Tcherevatenko adresse un immense «MERCI!» et ses plus chaleureuses salutations à chaque personne ayant travaillé sur son cas. Selon elle, c'est notre victoire commune ! Elle a ajouté que, d’après des sources crédibles, le soutien international a joué un rôle important dans le dénouement de cette affaire. Merci à toutes les personnes qui ont adressé des appels.

Pour l'anecdote: des membres d'Amnesty du canton de St-Gall, qui avaient écrit aux autorités russes pour la libération de Valentina Tcherevatenko, ont reçu une réponse par lettre recommandée en retour, écrite et signée en cyrillique. Ne sachant lire cet alphabet, les militant·e·s ont d'abord cru à une escroquerie. Mais après investigation, il s'est avéré que cette lettre avait vraiment été écrite par le ministère public russe et qu'elle informait les militant·e·s suisses sur la situation de Valentina Tcherevatenko.

Lire l'article et écouter l'émission relatant cette histoire sur le site web de la SRF (en allemand)