Des militants et militantes de «Queeramnesty», le groupe d’Amnesty International qui milite spécifiquement pour les droits des homosexuels, des bi- et des transsexuels, ont déposé le 2 mars 2010 à Berne une pétition munie de plus de 2600 signatures. Cette pétition demandait à l’Assemblée fédérale de modifier la définition du terme «réfugié» figurant dans la loi sur l’asile, de manière à ce qu’elle prenne en compte les persécutions liées spécifiquement à l’orientation et à l’identité sexuelle.
Une motion de la conseillère nationale Katharina Prelicz-Huber, qui fut discutée mercredi 3 mars au Parlement, poursuit le même objectif. Le Conseil fédéral a recommandé le rejet de cette motion, malgré le fait que les droits des homosexuels, des bi- et des transsexuels soient violés dans de nombreux pays. L’Iran, la Mauritanie, le Nigeria, le Qatar, l’Arabie Saoudite, le Soudan et le Yémen sanctionnent toujours de la peine capitale les actes homosexuels. Dans d’autres États, de nombreuses personnes croupissent en prison du fait de leur orientation sexuelle avérée ou présumée.
Amnesty International a constaté que la Suisse, dans sa pratique d’asile, n’entreprend que peu de chose pour assurer la protection et répondre aux besoins des réfugiés homosexuels. «Selon notre expérience avec ce genre de cas, la situation légale et la stigmatisation sociale sont insuffisamment prises en compte», explique Denise Graf, coordinatrice asile pour la Section suisse d’Amnesty International. «Les droits des lesbiennes, des gays, des bi- et des transsexuels ne peuvent être garantis que si les persécutions spécifiquement liées à l’orientation et à l’identité sexuelle sont légalement considérées comme des motifs d’asile et que si les autorités s’attaquent sérieusement à ce problème.»
L’inscription dans la Loi sur l’asile des motifs de persécution spécifiques aux femmes a mené à une sensibilité accrue de toutes les instances administratives et des institutions impliquées dans la procédure d’asile. Il reste par contre beaucoup à faire dans le domaine des persécutions liées à l’orientation sexuelle. C’est ainsi, par exemple, que l’on a conseillé à un homosexuel iranien de résoudre ses problèmes en cachant son homosexualité. Les autorités d’asile ne sont visiblement pas en mesure de se représenter concrètement ce que signifie pour un homosexuel de vivre dans un pays où son identité sexuelle est combattue, interdite et sévèrement sanctionnée.
Les réfugiés homosexuels en Suisse
Celles et ceux que l’on désigne par le nom anglais «Queer Refugees» sont des réfugiés qui ont dû quitter leur pays d’origine à cause de leur orientation ou de leur identité sexuelle. Ils ont fui leur patrie parce qu’ils y étaient persécutés, menacés et sanctionnés du fait de leur homosexualité, de leur bisexualité ou de leur transsexualité. Ces persécutions ne sont pas le seul fait de l’État mais également celui de leur famille ou de la société. Condamnés à fuir, ils espèrent trouver dans un autre pays tolérance et sécurité.
La Section suisse d’Amnesty International soutient environ une dizaine de cas de ce genre par année. L’Office fédéral des migrations ne publie pas de statistiques détaillées et il est très difficile de savoir combien de réfugiés homosexuels viennent chercher et obtiennent protection dans notre pays.
Même une simple estimation reste difficile du fait que bon nombre d’entre eux ne mentionnent pas les vrais motifs de leur fuite. Ils n’osent pas parler de leur identité ou de leur orientation sexuelle au cours des auditions d’asile. La plupart ont dû taire leur sexualité pendant des années par peur d’être discriminés. Ils craignent que les autorités suisses n’utilisent à leur tour ces questions comme prétexte pour refuser leur demande. Les requérants d’asile homosexuels font donc souvent valoir d’autres motifs à l’appui de leur demande d’asile. Ils racontent des histoires moins convaincantes à nos autorités, ce qui a pour conséquence directe une réponse négative à leur demande d’asile, malgré les graves persécutions dont ils sont victimes.
Une fois arrivés en Suisse, ils sont souvent exposés aux agressions verbales d’autres requérants d’asile. L’homophobie qui prévaut dans quelques cultures et dans quelques États s’exprime également fortement dans les centres d’accueil. Le personnel d’encadrement fait souvent peu de cas des problèmes des réfugiés homosexuels, souvent parce que, du fait de son manque de formation, il se sent dépassé par ces questions.
Communiqué de presse publié le 2 mars 2010, Berne / Lausanne.
Contact du service de presse