Depuis des années, la situation des réfugié·e·s basé·e·s dans les camps des îles de la mer Egée se dégrade. Les tensions nées de la décision prise fin février par la Turquie de laisser les réfugié·e·s poursuivre leur chemin vers l’Europe et le confinement total décrété dans les camps de réfugié·e·s en Grèce ont encore aggravé la situation. Les gens vivent à proximité les uns des autres, et les conditions d'hygiène et de salubrité ne permettent pas une protection suffisante en termes de santé. Les soins médicaux sont insuffisants tout comme l’accès à l’eau et à un logement. Le confinement total a, en outre, fortement restreint les quantités de nourriture accessibles et engendré une augmentation de la violence déjà préexistante.
«La situation dans les camps en Grèce, où vivent des dizaines de milliers de réfugié·e·s et de migrant·e·s, est la conséquence d’un renoncement à la responsabilité collective de les protéger. Il faut agir immédiatement afin d’accueillir ces personnes», a déclaré Alexandra Karle, directrice d’Amnesty International Suisse.
«La Suisse n’a pour l’instant accueilli que 23 mineurs non-accompagnés. Ceci est largement insuffisant et ne répond que trop faiblement au besoin de protection des milliers de personnes menacées. La Suisse ne fait qu’appliquer le règlement de Dublin, alors qu’un effort supplémentaire devrait impérativement être entrepris pour soulager la Grèce et protéger les réfugié·e·s des effets dramatiques de la surpopulation et des conditions de vie inhumaines dans les camps.»
La Suisse concernée
La Suisse doit agir car elle a sa part de responsabilité dans la crise qui se joue sur les îles grecques. En effet, cette situation est une conséquence prévisible du système de Dublin, qui contraint les requérant·e·s d’asile à déposer leur demande dans le premier pays européen où ils arrivent. En vertu de ce système, les pays qui se trouvent aux frontières de l’Europe enregistrent un nombre de demandes d’asile beaucoup plus important que les autres, ce qui provoque des situations inacceptables comme celles que vivent les réfugié·e·s des camps grecs.
La Suisse profite directement de ce système puisqu’il empêche la majorité des requérant·e·s d’asile et des réfugiée·e·s d’arriver sur son territoire. D’ailleurs, les chiffres du nombre de demandes d’asile n’ont jamais été aussi faibles depuis 2007 en Suisse, et les centres fédéraux sont actuellement largement sous-occupés. La Suisse est en outre l’un des pays qui applique le plus strictement le règlement de Dublin en renvoyant systématiquement les requérant·e·s vers le premier pays où ils ont effectué leur demande.
Réformer Dublin
Le Conseil national a adopté la semaine passée une motion demandant au Conseil fédéral que la Suisse fasse preuve de solidarité face à la situation en Grèce et qu’il s’engage en faveur d’une réforme de l'accord de Dublin. Le Conseil fédéral s’est lui-même positionné à plusieurs reprises contre le système de Dublin.
«Notre gouvernement a maintenant la possibilité de lancer un signal clair, en montrant son soutien à la Grèce et en accueillant rapidement un important contingent de réfugié·e·s. La Suisse doit aussi s’engager au niveau européen pour favoriser une réforme du système de Dublin et participer à la mise en place d’un système de répartition solidaire des réfugié·e·s, afin que chaque pays européen participe à l’effort collectif», a conclu Alexandra Karle.