Le compromis accepté par les parlementaires laisse espérer plus de justice pour les personnes concernées.© Philippe Lionnet
Le compromis accepté par les parlementaires laisse espérer plus de justice pour les personnes concernées. © Philippe Lionnet

Suisse Plus de justice pour les victimes de violences sexuelles

Communiqué de presse du 07 mars 2023, Berne. Contact du service de presse
Le Conseil des États a pris en compte une préoccupation centrale des personnes concernées et des professionnel∙le∙x∙s en ce qui concerne le droit pénal en matière sexuelle : la solution du refus («Non c’est non») doit désormais inclure expressément l'exploitation d'un état de sidération. Après des années de délibérations au Parlement, la voie est libre pour une nouvelle loi qui pourra enfin apporter plus de justice aux victimes de violences sexuelles.

 «Une personne qui profite de l’état de choc d’une victime pour avoir des relations sexuelles doit à l'avenir pouvoir être condamnée pour viol. Avec la décision d'aujourd'hui, le Conseil des États reconnaît que l'absence d’un refus ne doit pas être automatiquement interprété comme un consentement au rapport sexuel. La solution proposée améliore l'accès des personnes concernées à la justice et facilite la lutte contre la grande impunité en cas de viol», a déclaré Cyrielle Huguenot, responsable des droits des femmes à Amnesty Suisse. 

«Amnesty International salue la proposition du Conseil des États. Le Parlement ne doit maintenant plus perdre de temps et adopter la loi lors de la prochaine session. Les victimes de violences sexuelles en Suisse attendent justice depuis trop longtemps», a déclaré Cyrielle Huguenot.

«Il est central que la loi soit mise en œuvre de manière à couvrir tous les cas où la victime ne peut pas exprimer clairement son refus − que ce soit par peur, par surprise ou parce qu'elle est dépassée », a ajouté Cyrielle Huguenot. « Nous avons demandé depuis le début que la loi n'attende pas de refus actif de la part des personnes concernées et qu'elle ne leur attribue donc pas une part de responsabilité implicite en cas d'agression.»

«Une nouvelle loi ne suffira pas. Outre la mise en œuvre rapide du nouveau droit pénal en matière sexuelle, d'autres mesures sont nécessaires. Le Parlement doit veiller à ce que la formation et la sensibilisation de la police et des autorités de poursuite pénale soient améliorées et que l'aide aux victimes soit renforcée. Le consentement doit être placé au centre de l'éducation sexuelle, et il faut enfin des statistiques publiques détaillées sur la violence sexualisée, ainsi que des campagnes d'information et de prévention efficaces», a demandé Cyrielle Huguenot.

Attentes des femmes et des jeunes générations

Le Conseil des États a ajouté l'état de sidération à la solution lacunaire du «Non c'est non», en soi déficiente. Est donc punissable non seulement «Quiconque, contre la volonté d'une personne, commet sur elle ou lui fait commettre un acte d'ordre sexuel», mais aussi «quiconque profite à cette fin de l'état de sidération d'une personne». Il a ainsi intégré dans les éléments constitutifs des infractions de base des articles 190 (viol) et 189 (nouveau : atteinte sexuelle) du Code pénal une demande centrale des personnes concernées et de diverses organisations spécialisées. L'élément de la contrainte, jusqu'alors en vigueur, avait déjà été abandonné en première lecture.

Le projet de loi apporte des améliorations considérables par rapport au droit actuel. Malgré cela, Amnesty International continue de considérer que «Seul un oui est un oui» offre la meilleure protection contre les violences sexuelles. La solution du consentement précise sans équivoque que les relations sexuelles ne sont consenties que si toutes les personnes concernées sont d'accord. Derrière la solution du refus («Non c'est non») se cache toujours l'attitude dépassée selon laquelle le sexe est un bien auquel on a droit tant que personne ne s'y oppose.

Ce point de vue est également partagé par les personnes concernées:

«Nous sommes déçues que l'évidence du consentement pour les relations sexuelles ne soit pas ancrée dans la loi avec «Seul un oui est un oui». C’est une occasion manquée. Malgré tout, nous saluons cette étape historique et la reconnaissance de la sidération», déclarent Cindy Kronenberg et Morena Diaz, toutes deux membres de vergewaltigt.ch et du groupe de personnes concernées d'Amnesty Suisse.

Amnesty International avait lancé en 2019 la campagne «Justice pour les personnes qui ont subi des violences sexuelles» en Suisse. Au fil des années, des dizaines de milliers de personnes, de nombreuses organisations, des personnalités des milieux scientifique, juridique et de l’aide aux victimes, ainsi que des élu∙e∙x∙s de divers partis se sont rassemblé∙e∙x∙s au sein d’un vaste mouvement derrière la revendication pour un droit pénal sexuel basé sur le consentement.