17.060 Initiative multinationales responsables : pour protéger l’être humain et l’environnement
16.077, Droit de la société anonyme
18.321 Initiative Cantonale GE : La détention administrative d’enfants migrants doit être abolie.
CONSEIL NATIONAL
17.060, Initiative multinationales responsables : pour protéger l’être humain et l’environnement et 16.077, Droit de la société anonyme
Amnesty International recommande de soutenir l'initiative populaire «Entreprises responsables – pour protéger l’être humain et l’environnement» (initiative pour des multinationales responsables) et rejette la proposition de la minorité II (Flach) Arrêté fédéral concernant une «autorégulation assortie de la menace de mesures étatiques en cas de respect insuffisant des règles auto-décidées» (contre-projet à l'initiative populaire «Entreprises responsables – pour protéger l’être humain et l’environnement»)
En ce qui concerne la révision du droit de la société anonyme, Amnesty International recommande le maintien du contre-projet indirect du Conseil national (adhésion à la majorité de la CAJ-N). Et rappelle qu’une adoption définitive du contre-projet indirect telle que votée par le Conseil national le 14 juin 2018 par 121 voix à 73, entrainerait un retrait de l'initiative pour des multinationales responsables. L'engagement correspondant du comité d'initiative communiqué par lettre le 11 juin 2018 à l'ensemble des élu-e-s du Conseil national reste bien évidemment valable sans aucune réserve.
17.513 Mettre temporairement fin au regroupement familial en ce qui concerne les personnes admises à titre provisoire
Le groupe UDC souhaite introduire un moratoire de trois ans sur les regroupements familiaux pour les personnes admises provisoirement, y compris les réfugiés·e·s.Amnesty International rejette fermement cette proposition contraire aux normes internationales en matière de droits humains. Le groupe de personnes concernées comprend en particulier les familles qui sont déchirées par les situations de guerre civile, telle que nous la connaissons par exemple en Syrie. Le vœu le plus cher de ces familles est d'être réunies en sécurité. Cela n’est généralement et malheureusement pas possible dans leur pays d’origine et le regroupement familial dans un pays d'accueil comme la Suisse reste la seule solution.
Les règles régissant le regroupement familial sont déjà très strictes aujourd'hui. La loi sur les étrangers exige un délai d'attente de trois ans et la famille en Suisse ne doit pas dépendre de l'aide sociale. Beaucoup ne remplissent pas ces conditions et restent ainsi séparés de leurs proches pendant des années. Cela a des conséquences souvent lourdes pour le bien-être des personnes touchées, car le souci constant des membres de leur famille, restés en arrière, fait obstacle à leur intégration.
Il convient de noter ici que l'octroi du regroupement familial n'est pas un acte humanitaire, mais une obligation résultant du droit au respect de la vie familiale consacré par la Convention européenne des droits de l'homme ou par la Convention relative aux droits de l'enfant, deux conventions contraignantes pour la Suisse. Si on l’ajoute aux règles déjà très strictes en matière de regroupement familial, un moratoire supplémentaire de trois ans ne serait pas compatible avec les obligations de la Suisse au regard du droit international ni avec le respect de la vie familiale prévu par la Constitution fédéral.
17.509 Non à l'octroi direct de l'asile par le Conseil fédéral et 17.527 Compétence du Parlement en matière de prise en charge de requérants d'asile et de réfugiés relevant d'autres Etats
Le groupe UDC et la Conseillère Nationale Barbara Steinemann proposent, dans deux motions séparées, de retirer au Conseil fédéral la compétence d’accepter dans la procédure d’asile des contingents de réfugiés et de la transférer aux Chambres fédérales.
Amnesty rejette ces deux propositions qui malgré une formulation différente visent le même objectif, à savoir retirer au Conseil fédéral la compétence d’accueillir des contingents de réfugiés dans le cadre de réinstallations à partir de pays tiers. Outre le fait qu’il est important que ces décisions puissent être prises rapidement, il faut bien se rendre compte qu’elles concernent des personnes que la Suisse va elle-même choisir au cours d’un premier tri, dans des camps de réfugiés et ne sont donc pas, comme l’affirme l’UDC, des « pseudos-réfugiés » mais bien des personnes chassées de chez elles le plus souvent par des conflits armés.
17.519 Mesures contre les procédures dilatoires introduites en matière d'asile devant le Tribunal administratif fédéral
Selon l’UDC Sebastian Frehner le TAF ne dispose que de pauvres instruments pour lutter contre les recours abusifs en matière d’asile. Le droit applicable ne prévoit qu'une amende de 1000 francs au plus en cas d'usage de mauvaise foi ou de procédés téméraires et de 3000 francs au plus en cas de récidive (art. 60 al. 2 PA). Selon l’initiateur, « ces montants n'ont manifestement plus aucun effet dissuasif. Le business de l'asile est trop lucratif pour ça ». Il en conclut à la nécessité de relever le montant des amendes à 10'000 et a la possibilité d’interdire aux avocats de procéder devant le TAF pendant des périodes pouvant aller jusqu’à 4 ans en cas de récidive.
Amnesty rejette cette proposition inutile. L’Initiateur se base sur un cas publié dans la presse et datant de 2016 pour en déduire une montagne de recours infondés sans aucunement avancer de statistiques en la matière. Avant de modifier la loi il conviendrait pourtant de vérifier qu’il existe un réel besoin de le faire. Par ailleurs l’initiateur part de l’hypothèse que les mandataires des requérants d’asile gagnent d’importante sommes en recourant au TAF. Il oublie simplement que la majorité d’entre eux sont des employés des permanences juridiques des œuvres d’entraide qui sont rémunérés au mois et que de nombreux avocats travaillent « pro bono » dans le domaine de l’asile.
Dans la procédure d'asile, des biens juridiques protégés de manière absolue, tels que la vie et l'intégrité physique sont en jeu, ils sont également protégés par la Convention de Genève sur les réfugiés et la Convention européenne des droits de l'homme. Toute personne qui souhaite faire valoir qu’une décision négative du Secrétariat d'Etat aux migrations viole ces droits, doit donc avoir accès à une voie de recours effective. Une augmentation des amendes va à l’encontre du droit à un recours effectif et doit donc être rejetée.
18.425 Pour une application rigoureuse du droit pénal. Suppression de la clause qui protège les auteurs d'une infraction passible de l'expulsion
Gregor Rutz (UDC, ZH) propose par cette initiative de supprimer la « clause de rigueur » contenue à l’article 66d du Code pénal relative au renvoi des étrangers criminels.
Amnesty rejette fermement cette initiative. La raison d’être de cette clause dite « du cas de rigueur » qui empêche de renvoyer systématiquement les criminels étrangers est de rendre l’article 66a du Code pénal compatible avec le droit international, notamment en préservant le respect du principe de non refoulement ou celui de l’intérêt supérieur de l’enfant garanti par la Convention relative aux droits de l’enfant. Son abolition entrainerait donc le risque de voir la Suisse violer les engagements qu’elle a pris en ratifiant plusieurs conventions internationales.
18.321 Initiative Cantonale GE : La détention administrative d’enfants migrants doit être abolie.
Le Canton de Genève par le biais de cette initiative demande à ce que la possibilité de placer des mineurs en détention administratives soit prohibée.
Plusieurs instances onusiennes comme le Haut-Commissariat pour les réfugiés, le Haut-Commissariat pour les droits de l’Homme, le comité contre la torture et d’autres considèrent la détention administrative de mineurs comme contraire à la Convention relative aux droits de l’enfant.
Amnesty International soutient cette initiative et ceci pour les raisons suivantes :
Pour assurer l'exécution des mesure d'éloignement, la législation sur les étrangers en Suisse prévoit la possibilité de placer en détention des jeunes âgés de 15 à 18 ans. Une période maximale d'un an est autorisée. La détention administrative pour les mineurs de moins de 15 ans est en revanche exclue.
Le rapport de la Commission de gestion du Conseil national (CdG-N)du 26 juin 2018 a révélé que non seulement les enfants âgés de 15 à 18 ans mais aussi des enfants plus jeunes en Suisse peuvent être placés en détention administrative. La majorité d’entre eux sont emprisonnés avec des membres de leur famille.
Le 28 septembre 2018, le Conseil fédéral a donné son avis sur les recommandations de la CdG-N et a déclaré qu'en raison de l'absence de base légale, la détention administrative en droit des étrangers était exclue pour les enfants de moins de 15 ans et que les cantons devaient donc trouver des solutions alternatives. La détention administrative des enfants âgés de 15 à 18 ans n'est pas illégale selon la loi sur les étrangers et l’intégration. (LEI)
Amnesty International est fermement convaincue que des raisons liées au droit des migrations ne peuvent jamais justifier l'emprisonnement d'enfants. L’organisation a déjà invité appelé les États à appliquer la « tolérance zéro » sur cette question lors des discussions sur le Pacte mondial sur la migration. Même en dernier recours, la détention administrative des enfants est injustifiable. Peu importe que les enfants soient accompagnés ou non et Amnesty International estime que les États doivent rechercher des solutions alternatives à la détention lorsque des enfants sont concernés.