Amnesty International dénonce fermement le projet d’accord entre l’Union européenne et la Turquie qui sera discuté en fin de semaine lors du Conseil européen à Bruxelles. © Fotis Filippou
Amnesty International dénonce fermement le projet d’accord entre l’Union européenne et la Turquie qui sera discuté en fin de semaine lors du Conseil européen à Bruxelles. © Fotis Filippou

Accord entre l’UE et la Turquie Les réfugiés ne sont pas une marchandise!

16 mars 2016
Les 17 et 18 mars 2016, le Conseil européen se réunira à Bruxelles pour conclure, entre autres, un accord migratoire avec la Turquie. L’Union européenne cherche à faire de ce pays son garde-frontière pour empêcher les réfugiés de rejoindre les côtes de l’Europe. S’il est adopté, le projet d’accord esquissé lors d’un sommet entre l’UE et la Turquie le 8 mars dernier marquera une étape importante vers l'affaiblissement du système international de protection des droits des réfugiés.

Amnesty International dénonce fermement le projet d’accord entre l’Union européenne et la Turquie qui sera discuté en fin de semaine lors du Conseil européen à Bruxelles. Le projet esquissé lors d’un sommet entre l’UE et la Turquie le 8 mars dernier attaque les principes qui sont au cœur même de la protection internationale des personnes fuyant la guerre et les persécutions. Ce projet d’accord méprise les droits des demandeuses et demandeurs d’asile, réfugié·e·s et migrant·e·s.

D’une part, l’UE fermerait les yeux sur les violations des droits humains des réfugié·e·s et migrant·e·s en Turquie en désignant ce pays comme un «pays sûr» et en y renvoyant les personnes arrivées en Grèce par la mer Egée. D’autre part, la proposition qui consiste à installer un Syrien ou une Syrienne sur le territoire de l'UE pour chaque réfugié·e syrien·ne renvoyé·e de la Grèce vers la Turquie, est émaillée d'irrégularités morales et juridiques. Il est troublant que dans ce plan, chaque place de réinstallation offerte à un Syrien ou une Syrienne en Europe soit conditionnée au fait qu'un·e réfugié·e syrien·ne risque sa vie en embarquant à destination de la Grèce.

Amnesty International appelle les Etats membres de l’UE a rejeter un tel accord. Il est inacceptable que la Turquie soit considérée comme un «pays sûr» en matière d’asile et les renvois rapides et collectifs de migrant·e·s et réfugié·e·s viole le droit fondamental de chaque demandeuse et demandeur d’asile d’avoir accès à une audition équitable. Chaque demandeur et demandeuse d’asile est un être humain, et non un numéro interchangeable qui peut être marchandé.

La Turquie serait un «pays sûr»

Pour réussir leur plan, les dirigeant·e·s européen·ne·s doivent décider que la Turquie est un pays sûr pour les réfugié·e·s. Une idée absurde et déconnectée de la réalité dans ce pays :

  •  Des réfugié·e·s ont été purement et simplement renvoyé·e·s en Syrie et continuent de l’être;
  • Les forces de sécurité turques ont tiré sur des femmes et des hommes syriens qui tentaient de se mettre à l’abri sur le territoire turc;
  • Des milliers de réfugié·e·s syrien·ne·s vivent dans des conditions terribles, sans aide, soutien ni aucune perspective de protection;
  • Des centaines de milliers d’enfants syrien·ne·s n’ont accès à aucune éducation;
  • Les réfugié·e·s d'une autre nationalité subissent les mêmes conditions de vie que les Syriennes et Syriens, mais en plus vivent dans une « zone grise juridique », leur demande d’asile n’étant pas du tout examinée.
La Turquie, premier pays de refuge au monde

La Turquie accueille le plus grand nombre de réfugié·e·s au monde: environ 3 millions. Des dizaines de milliers de personnes fuient les violences en Syrie et cherchent à franchir la frontière de la Turquie pour se mettre à l’abri. Selon l’Agence des Nations-unies pour les réfugiés, 91% des personnes qui traversent  la mer Egée (entre la Grèce et la Turquie) depuis le début de 2016 viennent de Syrie, Afghanistan et Irak.

Il n’y a aucun doute que ces personnes ont besoin d’être protégées. L’Europe a un devoir absolu de protéger les réfugié·e·s. Elle doit le faire notamment en s’engageant résolument, compte tenu de l’urgence, à réinstaller des réfugié·e·s sur son territoire.