Après avoir emprisonné des dizaines d'éminents défenseurs des droits humains en 2012, les autorités saoudiennes ont élargi la répression visant des militants pacifiques en imposant de nouvelles interdictions de déplacement pour des raisons et des durées non définies; en démantelant au moins une organisation de la société civile, et en supprimant ses comptes sur les réseaux sociaux. Les autorités ont également pris des mesures visant à interdire certaines applications des réseaux sociaux si celles-ci ne pouvaient être totalement surveillées et contrôlées.
Par l'imposition de ces nouvelles restrictions à la liberté d'expression et d'association, les autorités saoudiennes continuent d'ignorer leurs obligations internationales en matière de droits humains et, parfois, la législation nationale. Les violations qui ont eu lieu jusqu'à présent en 2013 ne prendront pas fin tant que les autorités saoudiennes ne respecteront pas leurs obligations internationales, ainsi que les droits fondamentaux de toute personne vivant dans le pays.
Les interdictions de voyager
La dernière interdiction de ce genre visait Sadek al Ramadan, l'un des fondateurs et actuel secrétaire général du centre Adala pour les droits humains. Sadek al Ramadan a appris qu'il était interdit de voyage alors qu'il s'apprêtait à partir en vacances avec sa famille, le 29 mars 2013. Un agent des douanes de l'aéroport lui a simplement indiqué, pour toute explication, que le système informatique signalait une interdiction de déplacement le concernant. Malgré ses demandes répétées aux autorités, Sadek al Ramadan ne sait toujours pas pourquoi il est frappé d'une telle interdiction, ni en vertu de quelle autorité, ni pour combien de temps. Quelques semaines plus tôt, en janvier 2013, les autorités ont empêché Waleed Abu al Khair, directeur du SAHRM (Saudi Arabian Human Rights Monitor), de se rendre en Suède pour y recevoir le prix Olof Palme pour les droits de l'homme. De telles interdictions de voyager bafouent le droit de toute personne à partir de son pays et à y revenir.
Les emprisonnements de militants
En avril 2012, Mohammed Saleh al Bajady, autre co-fondateur de l'ACPRA, a été condamné par un tribunal spécial antiterroriste à quatre ans d'emprisonnement, suivis d'une interdiction de voyager de cinq ans. Cet homme a, semble-t-il, été déclaré coupable d’avoir participé à la création d’une organisation non autorisée, entaché l’image de l’État à travers les médias, encouragé les familles de prisonniers politiques à manifester et à organiser des sit-in, contesté l’indépendance du pouvoir judiciaire et possédé des livres interdits. En novembre 2012, Suliaman (ou Sulieman) al Rashudi, un ancien juge déjà âgé et éminent militant a été de nouveau arrêté, détenu au secret et à l'isolement jusqu'en février 2013. Il purge actuellement une peine de 15 années d'emprisonnement. Son collègue Saud al Hashimi purge une peine de prison de 30 ans. On lui a toujours refusé de rendre visite à sa mère malade.
Ces hommes, une fois libérés, seront également interdits de voyage pour une durée égale à celle de leur emprisonnement. Avec quatre autres personnes toujours emprisonnées elles aussi, ils appartiennent à un groupe initial de 16 militants condamnés en même temps à la fin de 2011 en raison de leur travail sur les droits humains. Ces six personnes avaient refusé de signer un document les engageant à ne pas répéter les « infractions », ni à militer publiquement, en contrepartie d'une « grâce » conditionnelle.
Les restrictions à la liberté d’association
Les autorités saoudiennes ne tolèrent pas les organisations indépendantes de défense des droits humains tels que le centre Adala, le SAHRM et l'ACPRA. Ces dernières ne sont pas autorisées à fonctionner sans licence, mais les licences leur sont rarement accordées et elles risquent une fermeture forcée par les autorités.
Le 9 mars, les autorités ont ordonné la dissolution complète de l'ACPRA et la confiscation de ses biens. Fondée en 2009, l'ACPRA était devenue l'une des plus éminentes et très rares organisations indépendantes de défense des droits humains en Arabie saoudite. Cette organisation a recensé diverses violations des droits humains et aidé de nombreuses familles de personnes détenues sans inculpation à porter plainte contre le ministère de l'Intérieur.
Les normes internationales relatives aux droits humains
En vertu de la Déclaration universelle des droits de l'homme, toute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le sien, et d'y revenir. Toute personne jouit également des droits à la liberté d'association et à la liberté d'expression. Les restrictions apportées à ces droits ne sont pas autorisées sauf lorsque la législation les prévoit ; elles doivent se rapporter à des objectifs considérés comme légitimes dans le droit international, c’est-à-dire : la protection de la sécurité et de l’ordre publics, de la santé ou de la morale, ou encore des droits et libertés d’autrui. Et il doit être possible de prouver qu’elles sont nécessaires et proportionnées à la réalisation du but ainsi visé. Le droit de tout personne à la liberté d'association inclut la possibilité de créer une organisation et de participer à ses activités.