Israa al-Ghomgham, 29 ans, a été arrêtée avec son mari Moussa al-Hashem et trois autres personnes en décembre 2015 pour avoir participé à des manifestations anti-gouvernementales dans la province orientale de Qatif, à la suite du printemps arabe. Ils sont actuellement détenus à la prison al-Mabahith à Dammam, dans la province de l’Est de l’Arabie saoudite.
Alain Bovard, porte-parole de la Section Suisse d’Amnesty International a déclaré: «Israa al-Ghomgham et quatre autres militants font aujourd’hui face à la plus impitoyable des sentences en raison de leur participation à des manifestations antigouvernementales pacifiques, nous demandons aux autorités saoudiennes de renoncer immédiatement à ces exécutions».
Bâillonner l’opposition
«Condamner Israa al-Ghomgham à la peine de mort signifierait que tous les activistes peuvent être ainsi ciblés en raison de leur participation à une manifestation pacifique et de leur activisme en faveur des droits humains. Ce serait là donner un terrible message» a ajouté Alain Bovard. Les charges retenues contre Israa al-Ghomgham, dont la plupart sont en lien avec sa participation pacifique à des manifestations, sont absurdes et politiquement motivées dans le but de bâillonner l’opposition.
Le ministère public saoudien a requis son exécution par décapitation ainsi que celle de quatre autres accusés. Selon les documents obtenus par Amnesty International, Israa est poursuivie pour:
- Violation du décret royal 44/A pour «sa participation à des manifestations à al-Qatif et pour avoir publié des informations au sujet de ces manifestations sur les réseaux sociaux»
- Avoir apporté un soutien moral à des manifestants violents en participant aux funérailles d’activistes tués dans des altercations avec les forces de sécurité
- Usage de faux pour avoir utilisé la photo de passeport d’une autre femme sur son compte Facebook
- Violation de l’article 6 de la loi contre le cyber-crime, notamment en faisant la promotion de manifestations et en publiant des photos et vidéos de manifestations sur Facebook.
Selon les informations obtenues par Amnesty International, le décret royal 44/A de février 2014, l’un des décrets faisant suite à la loi anti-terroriste, a été pour la première fois invoqué dans le cadre d’un procès de défenseurs des droits humains en février 2018.
Amnesty International a documenté le cas d’au moins 33 autres hommes chiites condamnés à mort. Tous ont été accusés d’activités menaçant la sécurité nationale et condamnés à mort par un tribunal pénal spécialisé, notoirement connu pour être un tribunal anti-terroriste. Parmi les Saoudiens actuellement dans le couloir de la mort, quatre d’entre eux ont été condamnés pour des actes commis alors qu’ils étaient adolescents.
La répression derrière les opérations de séduction
Le prince héritier saoudien Mohamed bin Salman veut donner l'image d'un pays qui mène des réformes pour « moderniser » le royaume. Mais derrière ses opérations de séduction, se cache une vague de répression sans précédent. Au moins 12 activistes des droits humains ont été arrêtés depuis le mois de mai de cette année.
Parmi eux se trouvent les militantes des droits des femmes - Loujain al-Hathloul, Iman al-Nafjan et Aziza al-Yousef, qui sont menacées d'une peine pouvant aller jusqu'à 20 ans de prison pour terrorisme. Au début du mois, Samar Badawi, sœur du célèbre blogueur Raif Badawi, et Nassima al-Sada ont également été arrêtées.
Parmi les personnes récemment arrêtées figurent également les militants des droits des femmes Nouf Abdulaziz et Maya'a al-Zahrani et les militantes des droits humains Mohammed al-Bajadi et Khalid al-Omeir.
«Il est scandaleux que ces militants aient été détenus pendant des semaines sans inculpation et qu'on leur ait refusé le droit à un avocat », a déclaré Alain Bovard. «Le monde ne doit plus fermer les yeux sur les persécutions impitoyables dont font l’objet les personnes qui défendent leurs droits en Arabie Saoudite.»
À l'occasion des 100 jours de la récente vague de répression dans le Royaume, Amnesty International mobilise les militants du monde entier pour manifester leur solidarité avec les personnes arrêtées.