Emirats arabes unis Plus d'information sur le procès des cinq militants

2 octobre 2011
Cinq militant arrêtés en mai 2011 pour «insultes publiques» sont jugés lors de ce qui semble être un procès inéquitable. Retour sur les faits et le contexte de leur arrestation.

Aux Émirats arabes unis, le Code pénal permet aux autorités d’emprisonner des personnes simplement parce qu’elles ont exprimé pacifiquement leurs opinions, en violation des garanties internationales en matière de droits humains qui protègent très clairement la liberté d’expression. L’article 176 du Code pénal prévoit une peine maximale de cinq ans d’emprisonnement pour «quiconque insulte publiquement le président, le drapeau ou l’hymne national de l’État». Son article 8 étend l’application de cette disposition aux insultes concernant le vice-président, les membres du Conseil suprême de la fédération et d’autres personnes.

Retour sur les faits précédant l'arrestation des militants

Les cinq militants ont été inculpés en vertu de l’article 176 pour avoir utilisé le forum politique en ligne UAE Hewar. Aucun des messages qu’auraient publiés les accusés sur le site UAE Hewar ne va au-delà de critiques au sujet de la politique gouvernementale ou de dirigeants politiques, ont déclaré les quatre organisations, qui ont examiné les déclarations en question. Elles n’ont trouvé aucun élément laissant penser que ces hommes avaient eu recours à la violence ou prôné son usage dans le cadre de leurs activités politiques.

Ahmed Mansoor est en outre accusé d’avoir incité d’autres personnes à enfreindre la loi et d’avoir appelé à boycotter des élections et à manifester. En mars, peu avant son arrestation, il a publiquement exprimé son soutien à une pétition signée par plus de 130 personnes réclamant la mise en place du suffrage universel direct pour l’élection du Conseil fédéral de la nation, un organe gouvernemental consultatif, et demandant que celui-ci soit doté de pouvoirs législatifs.

Dans une lettre que quatre des militants ont signée et qu’ils sont parvenus à faire sortir clandestinement de la prison fin août, ils ont déclaré, au regard des vices de procédure:  nous sommes certains que nous n’avons pas bénéficié jusqu’à présent ni ne bénéficierons à l’avenir d’un procès équitable, chose que tous les accusés méritent pourtant.» Ils ont également demandé dans cette lettre que la cour cesse de les juger dans le cadre d’une procédure secrète et permette à des observateurs et des citoyens d’assister aux audiences. Ils ont aussi exhorté la cour à les libérer sous caution, à les autoriser à examiner leur acte d’accusation et à laisser leurs avocats faire leur travail et interroger les témoins à charge.

Après la diffusion de cette lettre, Nasser bin Ghaith, l’un des signataires, s’est plaint du fait que les autorités carcérales aient encouragé d’autres détenus à le harceler. À la suite d’une altercation avec un autre détenu, la direction de la prison a ordonné qu'il soit enchaîné et placé à l'isolement dans une cellule sans climatisation alors qu’il faisait 40°C.

Même garantie légalement, la liberté d'expression est réprimée

La liberté d’expression est garantie par la Constitution des Émirats arabes unis et clairement inscrite dans le droit international relatif aux droits humains. Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) dispose que «[t]oute personne a droit à la liberté d’expression [qui comprend] la liberté de rechercher, de recevoir et de répandre des informations et des idées de toute espèce». Bien que les Émirats arabes unis ne soient pas partie à ce traité, il constitue une source faisant autorité et un texte de référence témoignant des bonnes pratiques internationales. Les normes internationalement reconnues n’autorisent que les restrictions liées au contenu dans des circonstances extrêmement limitées, telles que les cas de diffamation ou de calomnie envers des particuliers et de discours menaçant la sécurité nationale.

L’article 32 de la Charte arabe des droits de l’homme, qui a été ratifiée par les Émirats arabes unis, protège le droit à la liberté d’opinion et d’expression et celui de communiquer des informations à d’autres personnes par tout moyen. Les seules restrictions qui peuvent être imposées à l’exercice de ces droits sont celles considérées comme nécessaires pour «la protection de la sécurité […] nationale, de l’ordre public, de la santé publique, de la morale ou des droits et libertés d’autrui». L’article 13(2) de la Charte requiert en outre que les audiences soient «[publiques] sauf dans des cas exceptionnels lorsque l'exige l'intérêt de la justice dans une société respectueuse des libertés et droits de l'homme.»

La Déclaration des Nations unies sur les défenseurs des droits de l’homme déclare que les États doivent prendre «toutes les mesures nécessaires pour assurer que les autorités compétentes protègent toute personne […] de toute violence, menace, représailles, discrimination […], pression ou autre action arbitraire» en raison de leur participation à la défense des droits humains.