Iran Le fils et l’avocat d’une femme condamnée à la lapidation sont détenus

10 novembre 2010
Le fils et l’avocat d’une femme iranienne actuellement sous le coup d’une condamnation à la peine de mort par lapidation, Sakineh Mohammadi Ashtiani, ont été arrêtés le 10 octobre 2010 et sont détenus depuis lors, sans contact avec leurs familles ni un avocat. Amnesty International considère ces hommes comme des prisonniers d’opinion.

Javid Houtan Kiyan, l’avocat de Sakineh Mohammadi Ashtiani, et Sajjad Qaderzadeh, son fils, ont été arrêtés au cabinet du premier aux côtés de deux journalistes allemands qui les interviewaient au sujet de l’affaire de cette femme, qui avait bénéficié d’une forte attention internationale au cours des mois précédents. Le procureur, Gholam-Hossein Mohseni-Ejei, a confirmé l’arrestation des deux Allemands le lendemain.

En revanche, l’arrestation de Javid Houtan Kiyan n’a été confirmée que le 1er novembre 2010, lorsque le procureur a déclaré qu’un avocat arrêté aux côtés des deux Allemands était soupçonné de posséder trois cartes d’identité falsifiées ou contrefaites. Il a ajouté que, dans la mesure où l’affaire était liée à des « groupes antirévolutionnaires à l’étranger », elle en était encore au stade de l’enquête. Jusqu’à présent, il n’y a eu aucune confirmation officielle de l’arrestation de Sajjad Qaderzadeh, bien que Rajanews – un site Internet proche des autorités – y ait fait référence. Amnesty International pense que cet homme et Javid Houtan Kiyan sont tous les deux détenus à Tabriz, sans pouvoir communiquer avec des avocats ni les membres de leurs familles.

Si ces deux personnes sont détenues uniquement parce qu’elles ont exercé pacifiquement leurs droits à la liberté d’expression et d’association, et ont tenté de sauver la vie de Sakineh Mohammadi Ashtiani, respectivement leur mère et cliente, elles doivent être libérées immédiatement et sans condition, comme toute autre personne détenue pour les mêmes motifs. Sinon, elles doivent être inculpées d’une infraction dûment reconnue par la loi et jugées rapidement et équitablement, conformément au Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) – auquel l’Iran est partie.

 

INFORMATIONS GÉNÉRALES

Le 12 octobre 2010, Amnesty International a écrit aux autorités iraniennes pour demander confirmation de l’arrestation de Javide Houtan Kiyan et de Sajjad Qaderzadeh, et appeler à leur libération s’ils sont détenus en raison de leur action visant à sauver la vie de Sakineh Mohammadi Ashtiani. Aucune réponse n’était parvenue au moment de la rédaction du présent document. Sakineh Mohammadi Ashtiani a été arrêtée en 2005, à la suite de l’homicide de son mari. Elle était initialement accusée de meurtre mais ses enfants ont renoncé à leur droit de porter plainte contre elle, comme les y autorise le droit iranien. Elle a finalement été inculpée et reconnue coupable aux termes de l’article 612 du Code pénal pour sa participation présumée au meurtre. Elle a été condamnée à la peine maximale, soit 10 ans d’emprisonnement. Javid Houtan Kiyan a indiqué à Amnesty International, avant son arrestation, que la Cour suprême avait ramené cette peine à cinq ans en 2009 – le maximum pour « complicité de meurtre » – après qu’il avait soutenu que sa cliente n’avait rien fait qui aurait directement conduit à la mort de son mari (pour de plus amples informations, voir le document Iran. Sakineh Mohammadi Ashtiani. Une vie en jeu, MDE 13/089/2010, septembre 2010). Le 11 octobre 2010, le procureur a confirmé que deux étrangers avaient été arrêtés. Le 12 octobre, le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Ramin Mehmanparast, a déclaré que ces personnes étaient entrées dans le pays avec un visa touristique et ne disposaient d’aucune accréditation de journaliste. Il a ajouté qu’elles avaient été arrêtées parce qu’elles avaient un lien avec un « réseau antirévolutionnaire étranger ». Ces journalistes ont été transférés à Téhéran et ont pu entrer en contact avec le consulat de leur pays. Ces derniers mois, les persécutions visant des avocats de la défense se sont multipliées. Nasrin Sotoudeh est toujours en détention (voir l’AU 197/10). Mohammad Oliyaeifard, avocat et membre du bureau du Comité pour la défense des prisonniers politiques en Iran, une organisation de défense des droits humains, purge actuellement une peine d’un an de prison pour avoir dénoncé ouvertement l’exécution de l’un de ses clients dans des interviews accordées à des médias internationaux. Deux autres avocats, collègues de Shrin Ebadi au sein du Centre de défense des droits humains (CDDH) – une ONG qu’ils ont co-fondée – risquent également d’être poursuivis pour leurs activités en faveur des droits humains. Abdolfattah Soltani et Mohammad Ali Dadkhah ont été tous les deux arrêtés à la suite de l’élection présidentielle controversée de juin 2009. Bien qu’ils aient été libérés sous caution par la suite, ils font toujours l’objet de poursuites judiciaires fondées sur des charges formulées de manière floue, qui pourraient aboutir à leur emprisonnement et à leur éventuelle radiation du barreau. Mohammad Seyfzadeh, éminent avocat et membre fondateur du CDDH, vient d’être condamné à neuf ans de prison pour avoir «créé une association […] dont l’objectif est de porter atteinte à la sécurité nationale» et pour son «appartenance à une association dont l’objectif est de porter atteinte à la sécurité nationale». Il est sous le coup d’une interdiction de quitter le territoire depuis 2009, tout comme Hadi Esmailzadeh, un autre membre du CDDH. Les autorités ont également recours à d’autres méthodes pour empêcher les avocats d’exercer leur profession librement, notamment à des contrôles fiscaux sans autorisation qui leur permettent de geler les comptes bancaires et les autres actifs financiers des avocats visés et peuvent aboutir à la radiation de ces derniers (pour de plus amples informations, voir le document Iran. Des avocats de la défense sont privés de liberté, MDE 13/093/2010, 1er octobre 2010). L’article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) garantit le droit de toutes les personnes accusées d’une infraction de disposer du temps et des moyens nécessaires à la préparation de leur défense et de communiquer avec le conseil de leur choix. Les Principes de base des Nations unies relatifs au rôle du barreau disposent que les avocats doivent être autorisés à exercer leurs activités « sans entrave, intimidation, harcèlement ni ingérence indue ». En outre, ils affirment le droit des avocats à la liberté d’expression – également inscrit dans l’article 19 du PIDCP – qui comprend « le droit de prendre part à des discussions publiques portant sur le droit, l’administration de la justice et la promotion et la protection des droits de l’homme ». Le rapporteur spécial des Nations unies sur l’indépendance des juges et des avocats n’a pas été autorisé à se rendre dans le pays, malgré l’invitation permanente lancée en 2002 par l’Iran à toutes les instances des Nations unies compétentes en matière de droits humains.

 

ACTION RECOMMANDEE

DANS LES APPELS QUE VOUS FEREZ PARVENIR LE PLUS VITE POSSIBLE AUX DESTINATAIRES MENTIONNÉS CI-APRÈS (en persan, en arabe, en anglais, en français ou dans votre propre langue) :

  • demandez que Javid Houtan Kiyan, Sajjad Qaderzadeh et toute autre personne soient libérés immédiatement et sans condition s’ils sont détenus uniquement parce qu’ils ont reçu ou communiqué des informations au sujet de l’affaire de Sakineh Mohammadi Ashtiani ;
  • exhortez les autorités iraniennes à prendre les mesures nécessaires pour que ces personnes soient protégées contre toute forme de torture ou de mauvais traitements pendant leur détention ;
  • priez-les instamment de leur permettre d’entrer immédiatement en contact avec les avocats de leur choix et leurs familles ;
  • demandez que Sakineh Mohammadi Ashtiani ne soit pas exécutée de quelque manière que ce soit et qu’elle soit libérée si elle continue à être détenue uniquement pour des relations sexuelles consenties, auquel cas Amnesty International la considèrera comme une prisonnière d’opinion.

 

ENVOYEZ VOS APPELS AVANT LE 15 DÉCEMBRE 2010.

 

APPELS À

Guide suprême de la République islamique d’Iran,
Ayatollah Sayed ‘Ali Khamenei,
The Office of the Supreme Leader,
Islamic Republic Street – End of Shahid Keshvar Doust Street,
Tehran,
République islamique d’Iran
Courriel : [email protected] via son site
Internet : http://www.leader.ir/langs/en/index.php?p=letter (en anglais)
Formule d’appel : Your Excellency, / Excellence,

Responsable du pouvoir judiciaire,
Ayatollah Sadegh Larijani,
Howzeh Riyasat-e Qoveh Qazaiyeh
(Office of the Head of the Judiciary)
Pasteur St., Vali Asr Ave.,
south of Serah-e Jomhouri
Tehran 1316814737
République islamique d’Iran
Formule d’appel : Your Excellency, / Monsieur le Ministre,



COPIES À

Secrétaire général du Haut conseil des droits humains,
Office of the Head of the Judiciary,
Pasteur St., Vali Asr Ave. south of Serah-e Jomhouri,
Tehran 1316814737,
République islamique d’Iran
Courriel : [email protected]
Fax : +98 21 5 537 8827 (merci de vous montrer persévérant)

Ambassade de la République Islamique d'Iran,
Thunstrasse 68,
Case postale 227,
3000 Berne 6.
Fax: 031 351 56 52
E-mail: [email protected]