De gauche à droite: Ali Mojadam, Mansoureh Dahmardeh, Ebrahim Narouie, Shoeib Mirbaluchzehi Rigi, Kambiz Khorout, Arash (Sarkawt) Ahmadi, Mansour Hout, Nezamoddin Hout, Habib Deris, Moein Khanfari, Mohammad Reza Mojadam, Seyed Adnan Mousavi, Hassan Abyat et Seyed Salem Mousavi. © DR
De gauche à droite: Ali Mojadam, Mansoureh Dahmardeh, Ebrahim Narouie, Shoeib Mirbaluchzehi Rigi, Kambiz Khorout, Arash (Sarkawt) Ahmadi, Mansour Hout, Nezamoddin Hout, Habib Deris, Moein Khanfari, Mohammad Reza Mojadam, Seyed Adnan Mousavi, Hassan Abyat et Seyed Salem Mousavi. © DR

Iran Effrayante série d’exécutions et recours croissant à la peine de mort contre les minorités ethniques

Communiqué de presse publié le 2 mars 2023, Londres - Berne. Contact du service de presse
Depuis le début de l'année, les autorités iraniennes ont exécuté au moins un Arabe ahwazi, 14 Kurdes et 13 Baloutches à l'issue de procès manifestement inéquitables, et en ont condamné au moins une douzaine d'autres à la peine capitale, marquant ainsi une escalade effrayante dans le recours à la peine de mort comme outil de répression contre les minorités ethniques.

Selon les recherches effectuées par le Abdorrahman Boroumand Center et Amnesty International, les autorités ont exécuté au moins 94 personnes au cours des seuls mois de janvier et février, sur fond d'horribles allégations de violences sexuelles et d'autres actes de torture, ce qui représente une augmentation notable du nombre d'exécutions par rapport à la même période l'année dernière.

«Les autorités iraniennes procèdent à des exécutions à une échelle effrayante. Leurs actions constituent une atteinte au droit à la vie et une tentative éhontée non seulement d'opprimer davantage les minorités ethniques, mais aussi de répandre la peur que toute dissidence sera combattue par la force brute, dans la rue ou à la potence», a déclaré Roya Boroumand, directrice exécutive du Centre Abdorrahman Boroumand, une organisation iranienne de défense des droits humains.

Exécutions à la suite de procès inéquitables et de tortures

Fin février, les autorités iraniennes ont exécuté en secret un Arabe ahwazi et un Kurde à l'issue de procès manifestement inéquitables. Ces dernières semaines, les autorités ont également condamné à mort au moins six autres Arabes ahwazis et six Baloutches, dont certains avaient été condamnés en relation avec les manifestations qui ont embrasé l'Iran depuis septembre 2022.

Le 20 février, Hassan Abyat, un Arabe ahwazi, a été exécuté dans la prison de Sepidar, dans la province du Khouzestan, tandis qu'Arash (Sarkawt) Ahmadi, un Kurde, a été exécuté le 22 février dans la prison de Dizel Abad, dans la province de Kermanshah. Des sources informées ont indiqué à Amnesty International qu'après leur arrestation, les interrogateurs ont soumis les deux hommes à la torture et à d'autres mauvais traitements, les forçant à "avouer". Leurs "aveux" forcés ont été diffusés sur les médias d'État, en violation du droit à la présomption d'innocence et dans le but pour les autorités de les vilipender et de justifier leur exécution. Ils se sont également vu refuser l'accès à un avocat et ont été exécutés en secret, sans qu'aucune visite finale ni aucun avis ne soit donné à leurs familles.

Hassan Abyat a été condamné à mort à deux reprises - une fois par un tribunal révolutionnaire pour "inimitié contre Dieu" (moharebeh) et une fois par un tribunal pénal pour meurtre (ghesas) - en lien avec la mort d'un agent de la force paramilitaire Basij en 2011 et son appartenance présumée à un "groupe d'opposition". Hassan Abyat avait nié toute implication dans la mort de l'agent. Après l'avoir soumis à une disparition forcée, les interrogateurs ont attaché Hassan Abyat sur un lit spécialement conçu pour la torture, l'ont frappé avec des câbles et lui ont administré des décharges électriques sur les testicules, selon un témoin qui a également déclaré à Amnesty International que des cicatrices subsistaient sur le corps d'Hassan Abyat à la suite de ces tortures. Le tribunal l'a déclaré coupable sans enquêter sur ses allégations de torture.

Arash (Sarkawt) Ahmadi, qui a été arrêté en janvier 2021, a été condamné à mort pour "inimitié contre Dieu" (moharebeh) en lien avec son appartenance antérieure à un groupe d'opposition kurde iranien interdit et la mort d'un membre des forces de sécurité. Selon des activistes kurdes des droits humains, les gardiens de la révolution qui l'ont interrogé l'ont forcé à faire des "aveux" sous la torture et d'autres mauvais traitements.

Amnesty International s'oppose à la peine de mort dans tous les cas, sans exception. La peine de mort est une violation du droit à la vie et constitue le châtiment le plus cruel, inhumain et dégradant qui soit. En vertu du droit international, l'imposition de la peine de mort à l'issue d'un procès inéquitable constitue une privation arbitraire du droit à la vie.

Arabes ahwazis et Baloutches condamnés à mort

Ces dernières semaines, au moins 12 personnes appartenant aux minorités ethniques arabe ahwazi et baloutche ont été condamnées à mort à l'issue de procès manifestement inéquitables.

Le 14 février, six hommes arabes ahwazis - Ali Mojadam, Moein Khanfari, Mohammad Reza Mojadam, Seyed Salem Mousavi, Seyed Adnan Mousavi et Habib Deris - ont été informés qu'ils avaient été condamnés à mort à l'issue d'un procès collectif devant un tribunal révolutionnaire d'Ahvaz pour "inimitié envers Dieu" (moharebeh) en raison d'une prétendue "appartenance à des groupes illégaux", dans une affaire remontant à 2017. Selon des activistes des droits humains arabes ahwazis, leurs "aveux" entachés de torture ont été utilisés pour les condamner.

Entre décembre 2022 et janvier 2023, au moins six jeunes hommes de la minorité baloutche ont été condamnés à mort dans des procès distincts en lien avec les manifestations qui ont eu lieu dans la province du Sistan-et-Baloutchistan en septembre 2022. Shoeib Mirbaluchzehi Rigi, Kambiz Khorout, Ebrahim Narouie, Mansour Hout, Nezamoddin Hout et Mansour Dahmaredeh, qui souffre d'un handicap physique, ont été condamnés à mort pour "propagation de la corruption sur terre" (efsad-e fel arz) et/ou "inimitié contre Dieu" (moharebeh) pour incendie criminel et jet de pierres. Le droit international interdit l'application de la peine de mort pour les infractions qui n'atteignent pas le seuil des "crimes les plus graves" impliquant un homicide volontaire.

Selon des sources bien informées, les interrogateurs ont soumis les hommes à la torture et à d'autres mauvais traitements, y compris des violences sexuelles, pour les forcer à faire des "aveux". Ils ont enfoncé des aiguilles dans les parties génitales d'Ebrahim Narouie et battu Mansour Dahmardeh si violemment qu'ils lui ont cassé les dents et le nez.

Sur les 28 membres de minorités exécutés en 2023, 19 ont été condamnés pour des infractions liées à la drogue, sept pour meurtre, et deux pour des chefs d'accusation formulés en termes vagues de "propagation de la corruption sur terre" (efsad-e fel arz) et/ou d'"inimitié contre Dieu" (moharebeh).

«Il est terrible de constater que des exécutions ont lieu régulièrement dans un contexte de recours systématique à des "aveux" entachés de torture pour condamner les accusés lors de procès manifestement inéquitables. Le monde doit agir maintenant pour faire pression sur les autorités iraniennes afin qu'elles instaurent un moratoire officiel sur les exécutions, qu'elles annulent les condamnations inéquitables et les prononcés de peines de mort, et qu'elles abandonnent toutes les charges liées à la participation pacifique à des manifestations», a déclaré Diana Eltahawy, directrice régionale adjointe pour le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord à Amnesty International.

«Nous exhortons également tous les États à exercer leur compétence universelle à l'égard de tous les responsables iraniens raisonnablement soupçonnés d'être pénalement responsables de crimes de droit international et d'autres graves violations des droits humains.»

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