Un bulldozer de l’armée israélienne détruit les plantations et le système d’irrigation palestinien © Shabtai Gold/IRIN
Un bulldozer de l’armée israélienne détruit les plantations et le système d’irrigation palestinien © Shabtai Gold/IRIN

Israël / Territoires palestiniens occupés Discriminations dans l'accès à l'eau

Juin 2010
Le contrôle de l’accès à l’eau joue un rôle central dans le conflit du Proche-Orient: Dans l’ensemble, les 450'000 colons juifs utilisent à eux seuls plus d’eau que les 2,3 millions de Palestinien·ne·s en Cisjordanie. Dans la bande de Gaza, le blocus rend impossible la remise en bon état du système d’approvisionnement en eau. Corollaire: la pollution a envahi plus de 90% de l’eau potable.
Contrôle militaire en Cisjordanie

Alors que les colonies israéliennes (établies en violation du droit international) peuvent disposer en toute liberté des ressources en eau, les Palestinien·ne·s sont soumis depuis 1967 à des ordonnances militaires drastiques qui placent les ressources en eau sous l’unique contrôle de l’armée israélienne.

L’eau du Jourdain ne peut être utilisée que par Israël et 80% de la nappe aquifère la plus importante coulent en direction d’Israël. Il est par contre interdit aux Palestinien·ne·s de construire des installations d’approvisionnement en eau sans autorisation de l’armée ou de les réparer. Entre 1967 et 1996, seuls 13 permis ont été délivrés. Les installations d’approvisionnement en eau, construites ou réparées sans autorisation, sont régulièrement détruites par l’armée israélienne. Le paysan Fa’iq Ahmad Sheib. est devenu victime d’une telle action de destruction.

Les pratiques de l’armée israélienne transgressent le droit international.

Le blocus de la bande de Gaza

Dans la bande de Gaza, le blocus, qui contrevient au droit international humanitaire, rend impossible la remise en bon état du système d’approvisionnement en eau et du système d’épuration des eaux usées. Corollaire : la pollution a envahi plus de 90% de l’eau potable.

L’autorité palestinienne de l’eau et les donateurs internationaux

Etant donné qu’Israël contrôle tous les accès aux réserves d’eau, l’Autorité palestinienne de l’eau ne dispose que de compétences restreintes. Elle pourrait pourtant, grâce à une gestion plus efficace, également contribuer à l’amélioration de l’approvisionnement en eau de la population vivant dans les territoires qu’elle administre. Quant à la communauté internationale des Etats – dont la Suisse, en sa qualité d’Etat dépositaire de la Convention de Genève – elle devrait exercer une pression plus forte afin que le droit international humanitaire soit respecté.

Ceci dit le droit international :

L’accès à l’eau sans discrimination est inscrit dans plusieurs conventions internationales: Par ses pratiques discriminatoires, Israël manque à l'obligation qui lui incombe au regard du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC) de respecter le droit à l'eau. Ce traité requiert des États parties qu'ils s'abstiennent d'entraver directement ou indirectement l'exercice du droit à l'eau. Cette obligation, qu'Israël ne respecte pas, inclut celle de s'abstenir d'exercer toute pratique ou activité qui consiste à refuser ou à restreindre l'accès en toute égalité à un approvisionnement suffisant en eau, de s'immiscer arbitrairement dans les arrangements coutumiers ou traditionnels de répartition de l'eau et de limiter la quantité d'eau de manière illicite.

Les ordonnances militaires imposées par Israël entravent fortement l'accès à l'eau de la population palestinienne et elles sont appliquées de manière discriminatoire entre les colons israéliens et les Palestiniens vivant dans certaines zones. Elles constituent par conséquent une violation du droit à l'eau car elles sont «manifestement incompatibles avec des obligations juridiques préexistantes de caractère interne ou international ayant trait au droit à l'eau». Ces ordonnances violent également l'interdiction faite à la puissance occupante par les Règlements de La Haye de changer le caractère et la nature des biens et ressources naturelles du territoire occupé, ainsi que l'obligation de sauvegarder et d'administrer ces ressources conformément à la règle de l'usufruit et de ne pas utiliser les ressources du territoire occupé dans l'intérêt de sa propre population civile.

L'exemple du paysan Fa’iq Ahmad Sheib

Le 10 mars 2008, une patrouille de l’armée israélienne pénétrait sur les terres du paysan Fa’iq Ahmad Sheib dans le village d’al Al-Farisya, dans la vallée du Jourdain. Les soldats détruisirent le raccordement d’eau dans la maison et confisquèrent le tuyau en caoutchouc qui alimentait la ferme en eau depuis une source située à un endroit surplombant le village. Cette action résultait de la pose du tuyau sans autorisation préalable. Les villageois avaient essayé auparavant, en vain, d’obtenir le permis de construction d’une citerne, délivré par l’armée israélienne. Afin de sauver ses plantations, Ahmad Sheib fut obligé d’acheter de l’eau. Etant donné que les camions-citernes palestiniens ne sont pas autorisés à circuler sur les routes principales et qu’ils sont retenus aux barrages, les prix sont très élevés. En raison de cette situation, le paysan Fa’iq Ahmad a perdu, en été 2008, la plus grande partie de sa récolte. Par contre, la colonie israélienne voisine de Shamdot Mechola ne subit aucune restriction. On y trouve une grande piscine et un système d’irrigation par aspersion qui permet une agriculture florissante.