Israël / Territoires occupés 67 000 signatures pour la justice

8 mars 2011
Amnesty International a remis le 7 mars au Conseil des droits de l’homme des Nations unies une pétition de quelque 66 850 signatures l’invitant à faire un pas crucial en mars pour garantir la justice internationale aux victimes du conflit de 2008-2009 à Gaza et dans le sud d’Israël.

La pétition contient les signatures recueillies par des membres et des sympathisants d’Amnesty International dans le monde entier au cours des deux derniers mois dans le cadre de l’actuelle campagne de l’organisation pour garantir la justice aux victimes du conflit de Gaza. La pétition a été remise à Sihasak Phuangketkeow, président du Conseil des droits de l’homme, par les représentants d’Amnesty International à Genève.

La Cour pénale internationale doit intervenir

La pétition appelle le Conseil des droits de l’homme à adopter, lors de la session en cours, une résolution ouvrant la voie à un défèrement de la situation à Gaza à la Cour pénale internationale (CPI), qui contribuerait à combattre le cycle déjà ancien d’injustice et d’impunité en Israël et dans les territoires palestiniens occupés. La rapidité avec laquelle le Conseil de sécurité des Nations unies a déféré la situation en Libye au procureur de la CPI contraste de façon marquante avec son absence de volonté, jusqu’à présent, pour traiter de la situation du conflit à Gaza, dont les victimes attendent en vain depuis plus de deux ans que justice leur soit rendue. Une application systématique des normes internationales en matière de droit et l’application de mécanismes internationaux de justice chaque fois que des crimes de guerre ont été commis et que les autorités nationales n’ont pas la capacité ou la volonté d’agir, sont importantes pour la crédibilité du Conseil des droits de l’homme, de l’Assemblée générale et du Conseil de sécurité des Nations unies.

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Revendications d'Amnesty

Une solution de justice internationale doit donc être trouvée. Amnesty International demande instamment au Conseil des droits de l’homme d’adopter lors de sa 16ème session une résolution qui :

- condamne l’échec des autorités israéliennes et de l’administration de fait du Hamas à mener des enquêtes crédibles et indépendantes et à poursuivre en justice les auteurs présumés de violations ;

- soumette le rapport de septembre 2010 et le rapport à venir du Comité d’experts indépendants à l’Assemblée générale des Nations unies et appelle le Conseil de sécurité des Nations unies à déférer la situation à Gaza à la CPI ;

- note que le procureur de la CPI doit encore demander une délibération de la chambre préliminaire pour déterminer si la CPI a compétence pour enquêter sur les crimes de guerre commis pendant le conflit de Gaza, conformément à une déclaration d’acceptation de  l’autorité de la CPI soumise par l’Autorité palestinienne en janvier 2009 et lui enjoigne de le faire d’urgence; et

- appelle les États à s’acquitter de leur obligation d’enquêter sur les crimes commis au cours du conflit et d’en poursuivre les auteurs devant leurs tribunaux nationaux en exerçant la compétence universelle.

 

Prochaine session le 21 mars 2011

Au cours de ces derniers mois, Amnesty International a attiré l’attention des membres du Conseil des droits de l’homme sur la nécessité d’une telle résolution,  et les membres d’Amnesty International ont organisé des manifestations publiques et lancé un certain nombre d’actions dans le cadre d’une campagne menée dans au moins 18 pays afin d’attirer l’attention du monde sur l’absence continue d’obligation de rendre des comptes pour les crimes commis au cours du conflit de Gaza.

Le 21 mars, le Conseil des droits de l’homme des Nations unies examinera le second rapport du Comité d’experts indépendants chargé d’évaluer les enquêtes menées par les Israéliens et les Palestiniens sur les violations graves du droit international perpétrées par les forces israéliennes et les groupes armés palestiniens au cours du conflit qui a duré 22 jours. La Mission d’établissement des faits des Nations unies sur le conflit de Gaza, mandatée par le Conseil des droits de l’homme et présidée par le juge Richard Goldstone, a conclu en septembre 2009 que des crimes de guerre et peut-être, dans certaines circonstances, des crimes contre l’humanité avaient été commis par les deux parties. Elle a recommandé que les autorités israéliennes et les autorités compétentes dans la bande de Gaza soient tenues d’enquêter sur les violations graves du droit international humanitaire et relatif aux droits humains relevées par la Mission. Au cas où les autorités n’entreprendraient pas d’enquêtes indépendantes répondant aux normes internationales dans les six mois, la Mission recommandait que le Conseil de sécurité des Nations unies défère la situation à la Cour pénale internationale.

Le précédent rapport du Comité d’experts indépendants, rendu public en septembre 2010, souscrivait à l’évaluation continue d’Amnesty International selon laquelle les enquêtes menées par les autorités israéliennes et par l’administration de fait du Hamas, ne répondaient pas aux normes internationales requises d’indépendance, d’impartialité, de rigueur, d’efficacité et de célérité. Sans tenir compte du droit des victimes à la justice, le Conseil des droits de l’homme avait simplement voté le prolongement pour six mois du mandat du Comité, en lui demandant de présenter un nouveau rapport lors de la 16ème session du Conseil qui s’est ouverte le 28 février 2011.

«Plomb durci»

L’opération «Plomb durci», offensive militaire israélienne massive de 22 jours sur la bande de Gaza, qui s’est terminée le 18 janvier 2009, a fait 1400 morts parmi les Palestiniens, dont une majorité de civils. Des milliers d’autres ont été blessés et des milliers de personnes se sont retrouvées sans abri. La branche militaire du Hamas et d’autres groupes armés palestiniens ont tiré des roquettes et des mortiers sans discrimination sur le sud d’Israël, tuant trois civils israéliens. Dix soldats israéliens ont également été tués au cours du conflit.

Les enquêtes israéliennes sur des épisodes spécifiques ont été menées par l’armée israélienne et les autorités israéliennes n’ont à aucun moment laissé paraître leur intention de demander à de hauts responsables militaires ou civils de rendre compte de décisions politiques qui ont conduit à de graves violations du droit international au cours du conflit. Parmi les épisodes sur lesquels l’armée israélienne n’a pas enquêté ou a clos l’enquête sans entamer de poursuites, on relève des attaques contre des civils avec des armes de précision, des attaques contre des infrastructures et des biens civils, ainsi que contre des installations des Nations unies, des attaques contre des structures et du personnel médical, l’usage indiscriminé de phosphore blanc. Bien que quatre soldats israéliens aient été poursuivis au pénal dans trois affaires, jusqu’à présent seul un soldat israélien a été condamné à une peine de prison en lien avec le conflit, après avoir été reconnu coupable de vol de carte de crédit.

L’administration de fait du Hamas n’a pas entrepris d’enquête crédible sur les violations commises par des groupes armés palestiniens et n’a fait montre d’aucune intention de poursuivre en justice  les auteurs présumés de violations et de crimes de guerre, y compris de tirs à l’aveugle de roquettes sur Israël.