Depuis des mois, les forces de sécurité syriennes répriment brutalement le mouvement de protestation. Amnesty International a recensé les noms d’au moins 1’800 personnes tuées depuis le début de la vague de protestation. Dans tout le pays, des arrestations de masse ont lieu depuis le début de la répression, et un nombre alarmant de décès en détention a été signalé à l’organisation. Dans un nouveau rapport, «Deadly detention: Deaths in custody amid popular protest in Syria», Amnesty International documente les cas de 88 personnes arrêtées entre le 1er avril et le 15 août 2011 et mortes en détention. L’organisation fonde son rapport sur des entretiens avec des proches et des témoins, ainsi que sur des photos et des vidéos des personnes tuées, dont une partie a été soumise à une analyse médico-légale indépendante.
Ces 88 décès représentent une augmentation significative par rapport aux années précédentes, pendant lesquelles seuls 5 cas par an ont été rapportés à Amnesty International. «Une telle augmentation des décès en prison ne peut être une coïncidence. Elle semble être l’expression de la même violence brutale qui s’exprime au quotidien dans les rues syriennes», a déclaré Reto Rufer, responsable de campagne pour le Moyen-Orient à la section suisse d’Amnesty International. «Les éléments dont nous disposons indiquant le recours à la torture sont choquants. Nous estimons que le régime syrien persécute de manière systématique ses détracteurs avec la même brutalité aveugle.»
Pour l’ensemble des 88 cas de mort en détention documentés dans le rapport, il s’agit de personnes qui ont été arrêtées en raison de leur participation réelle ou supposée aux manifestations de masse qui ont lieu de façon continue depuis mars 2011. Tous sont des hommes, dont 10 enfants entre 13 et 18 ans. Les districts de Damas, Rif Damashq, Idlib, Hama, Alep et en particulier de Homs et Dera'a, où ont eu lieu d’importantes manifestations de masse, sont touchés.
Dans au moins 52 cas qui ont été rapportés à Amnesty International, tout indique que des actes de torture et des mauvais traitements ont conduit ou au moins contribué aux décès. L’organisation a examiné 45 vidéos prises par des proches ou des militants des droits humains après que les cadavres aient été remis aux familles. 20 de ces vidéos ont été soumises à des expertises médico-légales indépendantes. Les blessures qui apparaissent sur les images indiquent que les victimes ont été exposées à la violence brutale. Les corps des cadavres présentent des traces de coups violents, de brûlures et de coupures.
«De pair avec la violence généralisée et systématique utilisée pour étouffer les protestations, ces décès dans les prisons syriennes semblent correspondre à la définition de crimes contre l'humanité», explique Reto Rufer. Amnesty International appelle donc de toute urgence le Conseil de sécurité des Nations unies à saisir la Cour pénale internationale pour que celle-ci mène une enquête en Syrie. Amnesty International demande en outre aux Nations unies de décréter un embargo total sur les armes à destination de la Syrie ainsi que le gel des avoirs à l’étranger du président Bachar el Assad et de ses collaborateurs. «Contrairement aux mesures prises par la Suisse ou l'UE, la réaction du Conseil de sécurité de l'ONU a été totalement insuffisante jusqu’à présent. En plus de la Chine et de la Russie, l’Inde, le Brésil et l’Afrique du Sud se sont opposés jusqu’à présent à une résolution contraignante. Mais il n’est pas trop tard pour une action ferme de la part du Conseil de sécurité.»
Communiqué de presse publié le 30 août 2011, Londres / Lausanne.
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