Syrie Direction politique en panne

Opinion de Salil Shetty, Secrétaire général d'Amnesty International, parue dans la Tribune de Genève le 25 mai 2012
À l’heure où Amnesty International publie son 50ème rapport annuel sur la situation des droits humains dans le monde, la réponse de la communauté internationale aux crises des droits humains a bien souvent été marquée par la peur, les atermoiements, l'opportunisme ou l'hypocrisie.

salil.jpg Salil Shetty, Secrétaire général d’Amnesty International, s'indigne de l'inaction du Conseil de sécurité des Nations unies. © AI

Ceci est apparu de manière particulièrement criante au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, où l'attitude adoptée face aux gouvernements qui ont réprimé la contestation populaire a été très variable d'un pays concerné à l'autre.

Inaction du Conseil de sécurité des Nations Unies

La réponse apportée par la communauté internationale à la répression sanglante en Syrie constitue un exemple frappant d’une défaillance du pouvoir politique. La Russie et la Chine ont opposé leur veto à la demande de cessation des violences formulée par le Conseil de sécurité, malgré les preuves que le régime du président Bachar el Assad commettait des crimes contre l’humanité. L’inaction face aux événements qui se déroulaient en Syrie a donné du Conseil de sécurité des Nations unies l’image d’une instance lamentablement inutile et inadaptée aux besoins.

Cette passivité n’a rien de surprenant: la Syrie est l’un des principaux clients de la Russie en matière d’armements. Dès lors que les quatre autres membres permanents du Conseil de sécurité (Chine, Etats-Unis, France et Royaume-Uni) sont les plus grands marchands d’armes du monde, peut-on vraiment s’attendre à ce que le Conseil de sécurité remplisse son rôle de garant de la paix mondiale?

Nécessité d'un traité fort sur le commerce des armes

Les Etats doivent prendre au sérieux leurs responsabilités internationales. Une épreuve de vérité se présentera en juillet 2012, lorsque des Etats membres de l’ONU se rencontreront pour convenir d’un traité sur le commerce des armes. Ce sera l’occasion pour les gouvernements de se prononcer pour un traité fort, qui empêchera les transferts internationaux de tous types d’armes classiques vers des pays où il existe un risque important qu’elles soient utilisées pour commettre de graves atteintes aux droits humains.

Les gouvernements doivent par ailleurs investir dans des systèmes et des structures qui se fondent sur les droits humains et l’Etat de droit – et qui garantissent l’obligation de rendre des comptes, l’équité des procès et une justice indépendante; la réparation pour les violences subies; la fin des discriminations, de la corruption et de l’impunité; et l’égalité devant la loi.

D’un pays à l’autre, des manifestants ont montré avec force que l’aspiration universelle à la liberté et à la justice ne saurait être brisée ni contenue, quelles que soient les forces de répression en présence. Les dirigeants du monde ont reçu un avertissement sur la question des droits humains: il est grand temps de faire passer la justice avant la répression et les profits.