D'innombrables enfants souffrent de la faim en Syrie, où l'aide humanitaire ne peut opérer librement. © Lens Young Hamwi/Demotix
D'innombrables enfants souffrent de la faim en Syrie, où l'aide humanitaire ne peut opérer librement. © Lens Young Hamwi/Demotix

Conférence de paix Genève II sur la Syrie Apporter d’urgence une réponse aux souffrances des civils

La conférence de paix Genève II sur la Syrie doit s’attacher à mettre un terme aux sièges imposés par le gouvernement aux villes tenues par l’opposition, où les civils meurent de faim, a déclaré Amnesty International.

L’organisation exhorte le gouvernement et les groupes de l’opposition à prendre l’engagement de laisser les organisations humanitaires opérer librement en Syrie durant les pourparlers initiés par l’ONU, qui vont débuter le 22 janvier en Suisse.

«Des images poignantes nous sont parvenues ces derniers jours de villes syriennes assiégées, montrant des enfants au visage émacié et des silhouettes squelettiques, à la peau jaunie. La crise humanitaire en Syrie s’étend à un rythme effréné. Nous engageons tous les États participant aux discussions de Genève II, l’ONU, le gouvernement syrien et la Coalition nationale syrienne, à ériger en priorité absolue le soulagement des souffrances de la population syrienne», a déclaré Cilina Nasser, chercheuse sur la Syrie à Amnesty International.

«La conférence de paix représentera une rare occasion de faire des progrès décisifs en matière de droits humains, pour les deux parties au conflit. Les acteurs de Genève II doivent veiller à ce que les droits humains figurent en première ligne de l’ordre du jour et ne soient pas sacrifiés sur l’autel de compromis politiques.»

Civils cruellement et injustement punis

Le gouvernement syrien empêche l’aide vitale de parvenir à la population civile à Damas et aux alentours, notamment au camp de réfugiés palestiniens d’al Yarmouk, où au moins 49 personnes, dont 17 femmes et fillettes, seraient mortes depuis le mois de juillet 2013 ; certaines sont mortes de faim. Un infirmier d’un hôpital local a confié à Amnesty International que depuis mi-novembre 2013, lorsque les forces gouvernementales ont pris le contrôle d’un secteur proche du camp, plusieurs civils ont été abattus par des tireurs isolés alors qu’ils cherchaient de la nourriture dans les champs voisins.

À Mouadamiya et dans la Ghouta orientale, et dans d’autres secteurs, les civils sont pris au piège en raison des blocus et souffrent de la terrible pénurie de nourriture et de médicaments. En décembre 2013, Valérie Amos, responsable des opérations humanitaires de l'ONU, a estimé que 250 000 personnes se trouvant dans des zones assiégées étaient hors de portée de l’aide humanitaire. Un civil pris au piège à Mouadamiya a raconté à Amnesty International : «Je me lève la nuit et je bois de l’eau plusieurs fois, dans l’espoir qu’au matin je sentirai moins la faim… Il n’y a absolument rien à manger.»

«Le gouvernement syrien punit cruellement les civils qui vivent dans les secteurs tenus par l’opposition. Affamer les civils à titre de stratégie militaire est un crime de guerre. Il faut lever les blocus et rappeler que l’accès à l’aide humanitaire ne doit pas servir à marquer des points sur le plan militaire ou politique», a déclaré Cilina Nasser.

 

Des militants détenus et des civils retenus en otages

En plus de garantir l’accès humanitaire, Amnesty International demande aux participants de la conférence Genève II, et plus particulièrement aux États qui jouissent d’une influence sur le gouvernement syrien et les groupes armés d’opposition, d’assurer la libération de tous les militants pacifiques, y compris les défenseurs des droits humains, et des otages civils. Depuis 2011, les forces de sécurité gouvernementales ont arrêté des milliers d’opposants pacifiques. Si certains ont été libérés, de nombreux détenus ont été torturés à mort ou condamnés à de lourdes peines de prison à l’issue de procès iniques. D’autres sont toujours détenus sans jugement.

«Trop de gens sont arrêtés, enlevés et soumis à des disparitions forcées en Syrie, et on ignore le sort qui leur est réservé. Tout accord souscrit entre les participants de la conférence de paix Genève II doit englober comme objectif la libération des milliers de militants pacifiques, notamment les femmes et les enfants», a déclaré Cilina Nasser.

Pas de transferts d’armes

Amnesty International invite les États à stopper tous les transferts d’armes à destination du gouvernement syrien et de l’État islamique en Irak et al Sham (ISIS), ainsi que de tous les groupes armés d’opposition qui commettent des crimes de guerre et de graves exactions.

Il importe aussi de mettre fin aux attaques visant des cibles non militaires, notamment imputables au gouvernement, et il faut que les deux parties cessent de recourir massivement aux exécutions sommaires et à la torture. Depuis 2011, Amnesty International demande au Conseil de sécurité de l’ONU de déférer la situation en Syrie au procureur de la Cour pénale internationale.

Communiqué de presse publié le 21 janvier 2014, Berne, Lausanne.
Contact du service de presse