Radiographie d’une femme syrienne blessée par des tireurs d’élite, alors qu’elle faisait ses courses en 2011 © Amnesty International
Radiographie d’une femme syrienne blessée par des tireurs d’élite, alors qu’elle faisait ses courses en 2011 © Amnesty International

Liban/Syrie Réfugiés syriens en détresse: le monde regarde

De nombreux réfugiés syriens au Liban ne peuvent pas bénéficier de soins de santé indispensables, écrit Amnesty International dans un nouveau rapport. La situation est si catastrophique que certains d’entre eux choisissent de retourner en Syrie pour se faire soigner. La communauté internationale doit enfin agir. La Suisse doit accueillir plus de réfugiés.

Le rapport Agonizing Choices: Syrian refugees in need of health care in Lebanon met en évidence de graves carences dans l’offre des services médicaux proposés aux réfugiés. Certains, y compris des personnes qui avaient besoin de soins d’urgence, se sont parfois vu refuser l’admission à l’hôpital.

«Au Liban, il est extrêmement difficile pour les réfugiés syriens de se faire hospitaliser ou de recevoir des soins spécialisés, et cette situation est encore aggravée par l’insuffisance criante de fonds internationaux. Les souffrances de ces personnes sont la conséquence directe du manque d’empressement dont fait preuve la communauté internationale pour financer entièrement le programme d’aide des Nations unies au Liban», a déclaré Audrey Gaughran, directrice du programme Thématiques mondiales chez Amnesty International.

Les Nations unies ont sollicité 1,7 milliard USD pour le Liban en 2014, dans le cadre d’un appel de fonds d’un montant de 4,2 milliards USD en faveur des réfugiés syriens. À ce jour, elles n’ont obtenu que 17 % de ces fonds.

Le système de santé libanais est en grande partie privatisé et très cher, de nombreux réfugiés dépendent donc des soins subventionnés par l’Agence des Nations unies pour les réfugiés (HCR). Or, manquant sérieusement de fonds, elle a été contrainte de mettre en place un ensemble de critères restrictifs d’hospitalisation. Même lorsque les réfugiés satisfont à ces critères stricts, la plupart doivent prendre 25 % des coûts des soins à leur charge.

Les réfugiés syriens souffrant de graves problèmes de santé qui nécessitent une hospitalisation ou des soins plus pointus ne se font souvent pas soigner. Arif, un petit garçon de 12 ans gravement brûlé aux jambes, est au nombre des personnes qui se sont vu refuser l’hospitalisation. Son état s’est aggravé: ses brûlures ont provoqué une septicémie, ses jambes ont gonflé et se sont infectées. Aux termes des lignes directrices actuelles du HCR, Arif ne remplit pas les conditions requises pour bénéficier de soins subventionnés, l’organisme des Nations unies n’a donc pu prendre en charge le coût de son traitement que pendant cinq jours.

«L’histoire d’Arif illustre de façon tragique l’impact que peuvent avoir sur la vie des réfugiés syriens au Liban les restrictions imposées sur l’offre de soins de santé», a déclaré Audrey Gaughran.

En fin de compte, une association caritative locale a trouvé un médecin bénévole qui a opéré Arif mais, d’après les informations dont on dispose, le petit garçon doit encore subir 13 autres opérations qui ne peuvent pas être réalisées au Liban du fait de l’absence d’équipements plus spécialisés.

«Le HCR et ses partenaires prodiguent avant tout des soins primaires et interviennent dans les situations d’urgence, lorsque la vie des personnes est en danger. Cette hiérarchisation des priorités est essentielle, mais le personnel humanitaire travaillant dans le domaine de la santé sur le terrain a indiqué clairement à Amnesty International que les restrictions appliquées actuellement aux hospitalisations subventionnées pour les réfugiés pourraient être assouplies si les fonds humanitaires étaient plus élevés.»

En outre, de nombreux réfugiés syriens qui souffrent d’un cancer ou d’une autre maladie de longue durée n’ont pas les moyens de payer les traitements onéreux nécessités par leur état au Liban. Le nombre de familles gravement endettées en raison de dépenses de santé qui s’accumulent ne cesse de croître. Amal, une réfugiée syrienne, doit retourner en Syrie deux fois par semaine pour subir une dialyse rénale, traitement trop onéreux pour elle au Liban. «J’ai peur de retourner en Syrie, mais je n’ai pas le choix», a-t-elle déclaré à Amnesty International.

L’Europe et la Suisse doivent accueillir les réfugiés les plus vulnérables

La situation précaire des réfugiés au Liban montre une fois de plus à quel point il est important que les Etats européens s’engagent davantage pour l’accueil des réfugiés les plus vulnérables en provenance de Syrie.

Jusqu’à présent, la Suisse n’a accueilli qu’une partie infime des 2,5 réfugiés en provenance de Syrie. Dans une pétition Amnesty International demande à la Conseillère fédérale Simonetta Sommaruga de faciliter l’accueil des réfugiés syriens par des procédures non bureaucratiques. Un premier pas serait d’octroyer des visas aux proches parents de Syriens vivant en Suisse et de faciliter l’accueil de Syriens par des personnes privées.

Amnesty International salue le fort engagement de la Suisse à l’ONU pour que la Cour pénale internationale (CPI) se saisisse de la situation en Syrie. Lorsqu’une résolution onusienne sera adoptée dans ce sens, les hommes des troupes gouvernementales et de l’opposition soupçonnés de crimes contre l’humanité seront amenés à rendre des comptes devant la justice.

Communiqué de presse publié le 21 mai 2014, Londres, Lausanne.
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