Tir d'artillerie turc sur les positions syro-kurdes dans la région d’Afrin, 9 février 2018. © AP / Keystone
Tir d'artillerie turc sur les positions syro-kurdes dans la région d’Afrin, 9 février 2018. © AP / Keystone

Syrie Afrin: Des centaines de vies civiles en danger alors que l'offensive s'intensifie

Communiqué de presse publié le 28 février 2018, Berne/Genève. Contact du service de presse
L'armée turque, et dans une moindre mesure les forces kurdes, mènent des attaques aveugles dans les villes syriennes d'Afrin et d'Azaz, au nord d'Alep. Des dizaines de civils y ont été tués, selon des témoignages obtenus et vérifiés par Amnesty International.

L'organisation a interrogé 15 personnes vivant dans des villes et villages d'Afrin et d'Azaz ou récemment déplacées de ces villes et villages. Elles ont brossé un tableau sinistre des bombardements aveugles perpétrés par les parties bélligérantes. Le service de vérification numérique d'Amnesty International a pu confirmer bon nombre de ces affirmations par une analyse vidéo.

«Les combats à Afrin entre les forces turques et les forces kurdes soutenues par les États-Unis ont déjà fait de nombreux morts parmi la population civile, et mettent en danger la vie de centaines d'autres personnes», a déclaré Lynn Maalouf, directrice des recherches pour le Moyen-Orient à Amnesty International.

«Les informations faisant état de bombardements de villages et de zones résidentielles dans les villes sont profondément troublantes. L'utilisation d'artillerie et d'autres armes explosives imprécises dans les zones civiles est interdite par le droit international humanitaire et toutes les parties devraient cesser immédiatement ces attaques.»

Selon le Croissant-Rouge kurde, les attaques militaires turques ont fait 93 morts et 313 blessés parmi les civils, dont 51 enfants. Pendant ce temps, les forces kurdes du YPG ont bombardé la ville d'Azaz et auraient tué quatre personnes, dont une fillette de neuf ans.

L'analyse du service de vérification numérique d'Amnesty International concorde avec certains des témoignages reçus de la part de résidents d'Afrin et d'Azaz, notamment ceux faisant état d’une attaque perpétrée le 18 janvier contre un hôpital d'Azaz, qui aurait fait un mort et 13 blessés.

La violence dans la région s'est intensifiée après que le gouvernement turc a annoncé, le 20 janvier, le début d'une offensive militaire appelée «Rameau d’olivier» contre Afrin, attaquant cette ville sur plusieurs fronts dont les villages de Jenderess, Shara, Balbali, Shih, Rajo et Al-Shahba.

Attaques par les forces turques

Selon le Croissant-Rouge kurde, entre le 22 janvier et le 21 février 2018, 93 civils ont été tués, dont 24 enfants. En outre, 313 civils ont été blessés, dont 51 enfants.

Les habitants des villages de Jenderess, Rajo et Maabatli ont raconté qu'ils avaient été victimes de bombardements aveugles pendant des heures, même après que les forces turques ont promis d'assurer la protection des civils. Certains ont fui leurs maisons et ont vu leurs voisins se faire tuer.

La plupart des gens n'avaient pas été préparés à l'assaut des zones résidentielles et devaient se précipiter dans les sous-sols bondés sans avoir le temps de s'approvisionner en nourriture ou en eau, espérant que les obus ne les atteindraient pas.

Attaques par les forces du YPG

Des habitants d'Azaz ont décrit à Amnesty International des attaques aveugles perpétrées par les forces kurdes, qui auraient frappé des habitations et des hôpitaux. Selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme, les forces démocratiques syriennes alliées aux combattants du YPG ont mené une série d'attaques contre la ville depuis la mi-janvier.

Mustafa, un militant médias d'Azaz, a déclaré à Amnesty International qu'il avait été témoin des suites d'un attentat perpétré le 5 février, au cours duquel un enfant a été tué et cinq membres de sa famille blessés.

Le bombardement d'Azaz par les Kurdes a commencé avec l'opération «Rameau d’olivier»  en janvier. Le bombardement a été quotidien et des civils ont récemment été pris pour cible dans le centre d'Azaz. Aucun des objectif militaires n'a en revanche été visé. Les civils ont été la cible principale.

«Le 5 février, j'ai été témoin de la pire attaque. Une voiture a été heurtée par une fusée lancée par le PKK [référence aux forces du YPG]... Une fillette de neuf ans a été tuée sur le coup et cinq membres de sa famille ont été grièvement blessés. Ils ont été transférés en Turquie. Je ne sais pas comment ils ont survécu. La voiture était en feu. C'était horrible à regarder.»

En outre, un certain nombre de missiles et d’obus de mortier sont tombés dans des zones résidentielles en Turquie. Le gouvernement turc a indiqué qu'en date du 5 février, sept civils avaient été tués et 113 autres blessés à la suite de ces attaques.

«Le conflit en Syrie a infligé des souffrances indescriptibles à ceux qui y vivent, notamment parce que les belligérants n'ont toujours pas pris les précautions nécessaires pour assurer la protection des civils», a déclaré Lynn Malouf.

Les États-Unis, la Russie et d'autres États doivent user de leur influence pour faire pression sur les parties au conflit pour qu'elles mettent fin aux attaques illégales et veillent au respect du droit international humanitaire.