Tunisie Un blogueur est emprisonné pour «insulte à l’Islam»

Publié le 13 mars 2013, mis à jour le 29 avril 2013
Le 13 mars, la Tunisie célèbre sa Journée nationale de la liberté d'Internet. C’est à cette même date qu’un blogueur de 28 ans, Jabeur Mejri, a été jugé pour ses commentaires en ligne, il y a un an. Il écope d’une peine de sept ans et demi de prison.

«L'ironie veut que, le 13 mars 2012, à l'heure où le président Moncef Marzouki prononçait un discours en l'honneur des blogueurs, un tribunal jugeait Jabeur Mejri pour ses commentaires en ligne», a déclaré Hassiba Hadj Sahraoui, directrice adjointe du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord d'Amnesty International.

Jabeur Mejri a été arrêté le 5 mars 2012 et condamné le 28 mars à sept ans et demi de prison assortis d'une amende de 1 200 dinars (580 euros) par un tribunal de Mahdia, dans l'est de la Tunisie, pour des commentaires jugés insultants pour l'islam et les musulmans. Trois mois plus tard, la cour d’appel de Monastir a confirmé sa condamnation et sa peine. Ses avocats ont ensuite saisi la Cour de cassation, qui a confirmé sa sentence le 26 avril 2013.

«Jabeur Mejri est un prisonnier d’opinion; il n'aurait jamais dû être condamné, et encore moins envoyé en prison. Les autorités tunisiennes doivent annuler sa condamnation», a souligné Hassiba Hadj Sahraoui.

Alors qu’Amnesty International lance une campagne internationale en faveur de la libération immédiate et sans condition de Jabeur Mejri, la sœur du jeune homme a déclaré à l'organisation: «Jabeur est inquiet et déprimé car cela fait maintenant un an qu'il est derrière les barreaux, et il a le sentiment d'avoir été oublié.»

En 2012, le président tunisien a déclaré le 13 mars «Journée nationale de la liberté d'Internet» en l'honneur du militant politique en ligne Zouhair Yahyaoui, décédé le 13 mars 2005 à l'âge de 36 ans après avoir passé 18 mois en prison. Cependant, d'autres blogueurs tunisiens continuent de faire l'objet de poursuites pour leurs commentaires en ligne. Un ami de Jabeur Mejri, Ghazi Beji, a aussi été reconnu coupable et condamné à une peine identique lors du même procès, mais il avait alors déjà trouvé refuge à l'étranger.

Dans une autre affaire, la blogueuse Olfa Riahi est inculpée notamment de diffamation pour avoir publié sur son blog des allégations accusant l'ancien ministre des Affaires étrangères, Rafik Abdessalam, d'avoir séjourné à l'hôtel Sheraton de Tunis aux frais de l'État. Le ministre a démenti ces accusations et porté plainte contre Olfa Riahi pour atteinte à sa réputation et à celle d'autres institutions publiques.

«À l'heure où la Tunisie célèbre la liberté d'Internet, elle ne fait en réalité que resserrer son emprise sur ceux qui critiquent le gouvernement et expriment leurs opinions de façon pacifique. Il est temps que la Tunisie prouve qu'elle progresse réellement vers le respect de la liberté d'opinion et d'expression, en abrogeant immédiatement les lois qui restreignent abusivement cette liberté», conclut Hassiba Hadj Sahraoui.