L'enquête gfs.bern fournit pour la première fois des chiffres précis sur l’ampleur du harcèlement sexuel et des violences sexuelles en Suisse. Entre le 16 mars et le 15 avril 2019, 4495 femmes et jeunes filles de 16 ans et plus vivant en Suisse ont été interrogées. Trois méthodes d'enquête (enquête téléphonique, panel en ligne et questionnaire participatif en ligne) ont été combinées, puis pondérées pour obtenir des résultats représentatifs pour l’ensemble des femmes en Suisse. Les résultats de cette enquête ont été présentés et commentés lors d'une conférence de presse à Berne le 21 mai.
Chiffres clés sur le harcèlement sexuel
Deux répondantes sur trois ont dit qu'elles connaissaient personnellement d'autres femmes qui avaient été victimes de harcèlement sexuel. 40% des femmes interrogées craignent d'être victimes de harcèlement sexuel dans leur vie quotidienne. Un grand nombre de répondantes ont déjà fait l'expérience d'une grande variété de formes de harcèlement. Plus d'une femme sur deux a été harcelée après l'âge de 16 ans par des attouchements, des baisers et des étreintes non souhaités. Le harcèlement sexuel est le plus fréquemment vécu dans la rue (56% des femmes harcelées) et dans les transports publics (46%). Les femmes sont aussi victimes de harcèlement sexuel dans les bars ou les clubs (42%) et moins souvent au travail (33%).
Chiffres clés sur les actes sexuels non consentis
En Suisse, 22% des femmes ont subi des actes sexuels non consentis à partir de l’âge de 16 ans. Si l'on extrapole ces 22 % à l'ensemble de la population, cela signifie qu'environ 800’000 femmes ont déjà subi des actes sexuels non consentis. De toutes les femmes interrogées, douze pour cent ont déjà eu un rapport sexuel contre leur volonté. Cela correspond approximativement à la population de la ville de Zurich.
Seulement la moitié des femmes qui ont personnellement subi des actes sexuels non consentis ont partagé cette expérience avec des amies ou avec une personne de leur entourage. L'autre moitié a gardé l'incident pour elle. Seulement dix pour cent ont signalé l'incident à la police et seulement huit pour cent ont finalement déposé une plainte pénale. Les principales raisons pour lesquelles les femmes ne sont pas allées voir la police sont la honte (64%), le sentiment qu'elles n’avaient aucune chance d’obtenir justice (62%) et la peur qu'on ne les croie pas (58%). Une faible majorité de 51 % ont déclaré qu'elles n'étaient simplement pas certaines d'avoir le droit de le faire. Les violences sexuelles sont le plus souvent perpétrées par des personnes que les femmes connaissent: dans 68% des cas, les victimes connaissaient l'auteur de l’infraction.
Un changement s'impose
On reproche trop souvent aux femmes d'être responsables du harcèlement sexuel ou des agressions sexuelles qu’elles subissent. 70% des répondantes sont de cet avis. Aux yeux d'une nette majorité de 74% des femmes en Suisse, la société et le monde politique doivent en faire davantage pour lutter contre les violences et le harcèlement sexuels. Une nette majorité de femmes soutient la revendication d'Amnesty International, selon laquelle toute pénétration sexuelle sans consentement mutuel doit être qualifiée de viol. 84% des femmes sont tout à fait ou plutôt d'accord avec cette demande.