MAGAZINE AMNESTY Suisse Un festival sans complaisance

Article paru dans le magazine AMNESTY, n°48, publié par la Section suisse d’Amnesty International, février 2007.
Le Festival international du film des droits humains tiendra cette année sa cinquième édition. De plus en plus, il se profile comme un forum d’expression où l’art des mots, des images et de la lumière devient indispensable pour dénoncer les violations des droits humains. Entretien avec Léo Kaneman, codirecteur des programmes avec Yaël Reinharz Hazan.

Yaël Reinharz et Léo Kaneman . © AI

AMNESTY: Comment vous est venue l’idée de créer le Festival international du film sur les droits humains?

Léo Kaneman: Le Festival du film sur les droits humains est le fruit d’une rencontre avec Yaël Reinharz Hazan. Nous sommes partis d’un constat : Genève, qui est connue comme une capitale internationale des droits de l’homme, n’avait étonnamment pas de forum sur cette question-là. Il était temps de prendre une initiative.

Qu’est-ce qui vous a poussés à vous lancer dans l’aventure?

Nous étions indignés par l’ampleur des violations des droits humains et pensions qu’il était urgent de les dénoncer au sein de la cité. Notre engagement est radical, sans complaisance, une démarche à la fois culturelle et politique. Plus concrètement, nous nous sommes placés en face de la Commission pour les droits de l’homme de l’ONU, l’actuel Conseil des droits de l’homme.

Pensez-vous que le Conseil à lui seul ne suffit pas?

En tant que tribune libre, nous souhaitions parler librement de tout, vu que ce Conseil, dominé par les Etats, n’aborde pas certains problèmes comme la situation en Tchétchénie ou à Guantánamo, par exemple.

Que propose le festival?

Pendant la période du festival, nous programmons chaque soir un film suivi d’un débat sur les violations liées à l’actualité politique. L’expérience nous prouve que le cinéma est un excellent observateur de la société actuelle. Ce n’est donc pas un objet artistique à part. Voilà ce qui nous différencie des autres festivals. Chez nous, le cinéaste est à côté d’un défenseur des droits de l’homme, d’une victime, d’un spécialiste de la question…

Quel est votre public cible?

Dès la première édition par exemple, nous nous attendions à un public constitué d’universitaires et de travailleurs des institutions internationales. A notre grande surprise, nous avons vu affluer un public diversifié de Genève et de France voisine, un véritable engouement citoyen. Lors de la dernière édition, 16’000 spectateurs sont venus participer aux débats.

Comment est-ce que votre festival participe à l’amélioration des droits humains?

Nous essayons de soutenir les actions et les ONG qui luttent dans le domaine des droits de l’homme. Cette année par exemple, nous ferons pression aux côtés de Reporters sans frontières pour que justice soit faite à l’encontre des auteurs de l’assassinat de la journaliste Anna Politkovskaïa. Par ailleurs, et en particulier par le cinéma, nous nous faisons les relais de ceux qui souffrent et qui sont sans voix. Il faut intervenir en permanence contre les violations de la dignité humaine pour espérer obtenir des résultats palpables.