C’est un banquier privé genevois qui, le premier, a eu l’idée de créer un mécanisme de prévention contre la torture. Depuis les années septante, l’idée a fait son chemin, parfois à très, très petits pas. Elle a donné finalement naissance au Protocole facultatif à la Convention des Nations unies contre la torture (OPCAT). L’assemblée des Nations unies l’a adopté le 18 décembre 2002, il est entré en vigueur le 22 juin 2006. Le Protocole facultatif est le premier instrument international qui cherche à prévenir la torture et autres formes de mauvais traitements en instituant un système de visites régulières des lieux de détention, effectuées par des organismes indépendants, aux niveaux international et national.
On aurait aimé trouver la Suisse dans les premiers pays qui ont ratifié l’OPCAT. Elle a certes signé le protocole le 25 juin 2004 – mais on cherchera vainement son nom dans la liste des trente-cinq pays qui l’ont ratifié.
En effet, le Conseil fédéral actuel, tout comme les gouvernements précédents, a toujours eu de la peine à faire pour la Suisse ce qu’il recommandait aux autres pays. Et lorsque finalement, en janvier 2007, il dépose son message, on y cherche en vain les garanties qui assurent que le mécanisme de prévention helvétique – une commission extra-parlementaire en l’occurrence – ait les moyens de fonctionner. Un secrétariat permanent n’est pas jugé nécessaire et dans une première version du message, il est même sérieusement envisagé de ne verser aucune indemnité aux membres de la commission! On aurait pu penser que le Conseil des Etats améliorerait la situation. Loin de là, il n’a fait que l’empirer en adoptant, en décembre 2007, des amendements qui rendent le mécanisme de prévention «facultatif» et sans action régulière.
Il y a pourtant un espoir que la Suisse finisse par ratifier l’OPCAT et par mettre sur pied un mécanisme digne de ce nom. Au Conseil national, la Commission des affaires étrangères, puis la Commission des affaires juridiques,ont corrigé le tir et redonné au mécanisme de prévention son caractère obligatoire et la régularité de son action. La loi mentionne par ailleurs que la commission pourra bénéficier d’un secrétariat permanent.
La balle sera dans le camp du Conseil national cet automne! Souhaitons qu’il garde le cap et que le Conseil des Etats se rallie ensuite. Aucun pays ne peut se passer d’un mécanisme de prévention contre la torture et les traitements dégradants. La Suisse ne peut pas montrer l’exemple, c’est trop tard,mais elle peut au moins faire ce qu’elle recommande aux autres à longueur d’année en matière de respect des droits humains!