AMNESTY: La criminalisation des mouvements sociaux est un réel problème à Oaxaca. Comment et pourquoi sont-ils criminalisés ?
Alba Cruz: Les mouvements sociaux sont nombreux à Oaxaca. Ils organisent diverses actions, comme le blocage de routes. Le gouvernement est souvent dérangé par ces organisations et leurs agissements. C’est pourquoi l’Etat a mis en place différents moyens afin de criminaliser leurs actions et de décrédibiliser leur lutte. Cette criminalisation passe par la publication d’articles dans les médias de masse, où les mouvements sociaux sont présentés comme des gangs cherchant à tout prix la déstabilisation sociale. Il y a également les harcèlements, les menaces et les meurtres dont sont victimes les défenseurs et défenseuses des droits humains. La criminalisation de la protestation sociale est une chose très grave. De nombreux défenseurs sont actuellement visés par des procès, et c’est à nous, en tant que membres du comité, de les défendre.
Quelles sont les conséquences de la criminalisation sur le travail du comité ?
Au sein du comité, nous traitons les cas de défenseurs «modèles». La dénonciation de ces cas a permis de mettre en évidence les injustices du système judiciaire, tant au niveau étatique que fédéral, ce qui a provoqué des tensions avec les sphères du pouvoir à Oaxaca. Le comité a commencé à recevoir des menaces de mort, ses membres ont été victimes d’accidents, de harcèlement au bureau et à leur domicile. Tout cela nous fait très peur. Cependant, nous voulons poursuivre notre travail, parce que nous nous sommes engagés pour les défenseurs.
Est-ce qu’il est difficile pour vous d’entreprendre des démarches juridiques ?
Souvent, les instances juridiques ne veulent pas recevoir nos demandes ou nous sommes renvoyés d’une instance à l’autre. Lors de la dernière demande que j’ai présentée, j’ai reçu des menaces sur mon téléphone portable. Nous avons beaucoup de difficultés à faire des dénonciations juridiques en raison du manque de crédibilité de notre démarche et des obstacles mis en place par les institutions judiciaires. Le plus souvent, nous n’avons pas d’autre alternative que de faire des dénonciations publiques. Cela se passe ainsi dans tous les cas, dans tout le pays.