MAGAZINE AMNESTY Une politique de repli

Article paru dans le magazine AMNESTY, n°66, publié par la Section suisse d’Amnesty International, septembre 2011.
Dans le domaine de l’asile, nos autorités invoquent souvent la nécessité de «trier le bon grain de l’ivraie», en d’autres termes les «vrais» des «faux» réfugiés, pour garantir la crédibilité de notre ...

196_kunz.jpg Marie-Claire Kunz, juriste et chargée de communication pour le secteur réfugiés du Centre social protestant. © DR

Dans le domaine de l’asile, nos autorités invoquent souvent la nécessité de «trier le bon grain de l’ivraie», en d’autres termes les «vrais» des «faux» réfugiés, pour garantir la crédibilité de notre politique d’asile. Au travers d’incessantes révisions de la Loi sur l’asile, la politique suisse d’asile est devenue une véritable machine à trier pour renvoyer le plus grand nombre, sans examen approfondi des demandes : de 2009 à 2010, près de 75% des décisions négatives rendues par l’Office fédéral des migrations l’ont été au moyen de clauses dites de non-entrée en matière, autorisant l’autorité à ne plus examiner les motifs d’asile pour prononcer un renvoi vers le pays d’origine ou un pays tiers, pour des raisons de nature formelle. Absence de papiers d’identité, provenance d’un pays considéré comme sûr par le Conseil fédéral, transit par un paystiers ou par un Etat de l’Union européenne sont autant de clauses qui permettent d’appliquer ces mécanismes, dans près de 48% de l’ensemble des décisions rendues par l’ODM. Les accords de Dublin, entrés en vigueur en décembre 2008, constituent l’ultime outil dont s’est dotée la Suisse pour peaufiner sa politique de repli, puisque entre 2009 et 2010, 12 035 personnes ont fait l’objet d’une procédure en vertu de ces accords. La Loi sur l’asile est pourtant la garante, dans notre pays, de l’application de la Convention de Genève de 1951, dont l’objectif premier est la protection de celles et ceux qui sont victimes de persécution dans leur pays. Un objectif qui semble bel et bien avoir sombré dans l’oubli au fil des révisions législatives, mais qui lui seul peut rendre crédible une politique d’asile digne de ce nom.