Le père Solalinde n’a plus guère de temps à consacrer à sa paroisse. Humble mais déterminé, ce prêtre catholique qui tient un refuge pour migrant·e·s de 1600 m2 à Ixtepec, consacre tout son temps à dénoncer les abus et les disparitions forcées dont ces personnes sont victimes. «Je dénonce systématiquement tous les cas de kidnapping et de violations de droits humains dont je prends connaissance. J’alerte les médias. C’est pour cela que les criminels ont peur de moi.»
Les plus hautes sphères du pouvoir sont en cause et ses déclarations perturbent le juteux trafic des bandes criminelles qui agissent conjointement avec des représentants de l’Etat. Le père Solalinde a accusé l’ancien gouverneur de l’Etat, qui risque désormais la prison. Les menaces de mort n’ont pas tardé. Les autorités ont été sommées d’assurer sa sécurité: depuis 2011, quatre policiers surveillent le centre d’accueil, et deux gardes du corps le suivent en permanence. Mais cela ne suffit pas. Un jour, alors qu’il se rend à la pharmacie, la vendeuse l’avertit: «heureusement que je vous vois, ils ont engagé quelqu’un pour vous tuer.» Il a également échappé de justesse à une agression alors qu’il célébrait des funérailles. Suite à cette série de menaces, Amnesty International a lancé une action urgente demandant sa protection. La masse de courriers reçus a convaincu la procureure générale de la république, qui a décidé d’employer les grands moyens.
Détermination
Rien ne semble ébranler le prêtre catholique: «Je suis comme un berger qui doit protéger ses moutons vulnérables et attaqués par des loups.» C’est aussi simple que cela. Les membres des autres églises ne partagent pas la même foi. Mais le père Solalinde ne leur en tient pas rigueur et conclut simplement: «ils ont peur d’être tués.» Invité par Peace Brigades International et Amnesty International, cet homme fin, à la voix chantante, a fait le tour des organisations non gouvernementales européennes pour dénoncer la situation dont sont victimes les migrant·e·s dans son pays. A son retour au Mexique, ses gardes du corps l’ont accueilli à l’aéroport. Il s’est ensuite réfugié quelques semaines dans un monastère tenu secret. Mais la situation ne s’est pas calmée et la promesse de protection faite par le gouvernement mexicain n’a toujours pas été honorée…