La Lausannoise d’origine arménienne a choisi, depuis plusieurs années, par son engagement artistique, d’aborder la migration comme un phénomène positif, porteur d’espoir. Tableaux, patchworks, totems, l’artiste explore supports et matériaux variés afin de «métisser des symboles et d’illustrer les rencontres». Sur une table ronde, des bols multicolores venant de Chine, d’Afrique du Nord de du Moyen-Orient. Accrochés au mur, des djellabas, batiks et tissus colorés forment une porte et esquissent une ouverture vers l’Orient. Ainsi, l’artiste réunit différentes cultures autour d’un dénominateur commun : «Je cherche à associer différents univers, les uns aux autres, comme des mondes circulaires.»
Cette sensibilité pour le mélange, l’hétéroclisme et l’interculturel l’accompagne depuis toujours. «Il y avait des tapis orientaux et des tableaux occidentaux, on mangeait des plats suisses et des plats du Moyen-Orient. La musique aussi était très variée.» Aujourd’hui, ce mélange constitue une richesse qu’elle souhaite défendre bec et ongles. Membre du collectif Droit de rester, qui défend les droits des migrant∙e∙s débouté∙e∙s sur la scène politique vaudoise et helvétique, Christine prépare également, en collaboration avec le Bureau lausannois de l’intégration, des ateliers artistiques avec des migrant∙e∙s. Objectif : les associer à une production artistique médiatisée qui valoriserait leur contribution à la société suisse.
Pour parler de la question de la migration, l’artiste utilise principalement des textiles. «Sur la planète, tout le monde s’habille, et les peuples ont développé une multitude de savoir-faire. C’est donc une base très riche que je mobilise.» Les matériaux, la plasticienne les déniche sur les marchés, dans les magasins de seconde main où dans les échoppes près des gares entre Lausanne et Genève. «Je n’ai pas besoin de voyager, toute cette diversité arrive jusqu’à nous en Suisse, avec les immigrés.»
Christine Matthey-Isperian cherche à «valoriser ce qui est disqualifié et à intégrer ce qui est rejeté». Son travail : une métaphore. En sublimant ces objets abandonnés, elle met en valeur les immigré∙e∙s stigmatisé∙e∙s. «Les migrants ne sont pas comme certains voudraient les décrire : miséreux et assistés. Ils ont des envies, une générosité et de grandes motivations, ils ont vraiment beaucoup à apporter à notre société !»