Un homme de terrain qui aime voir de ses propres yeux et ne se borne pas aux chiffres ou aux rapports qui livrent des statistiques et des discours simplistes. Tel pourrait être le portrait-robot d’Étienne Dubuis. Il faut pourtant creuser au fond de ses paroles pour découvrir ce qui anime ce Vaudois, infatigable pèlerin en quête de vérité et de dignité humaine.
À 25 ans déjà, l’homme sillonne le monde en tous sens. Il fait son premier voyage en Égypte, pays auquel il consacre de grands reportages sur l’archéologie, la montée de l’islamisme et l’oeuvre de Soeur Emmanuelle en faveur des plus démuni·e·s. Il se rend ensuite au Nicaragua, où il rencontre Maurice Demierre, un paysan de Bulle, alors parti pour améliorer les conditions de vie de ses confrères d’Amérique latine, qui sera assassiné en 1986. On connaît aussi à Étienne Dubuis des périples en Inde, au Liban, au Soudan, en Afghanistan et au Chili, régions auxquelles il consacre de nombreux articles.
À partir de 1993, le reporter est engagé au Nouveau Quotidien édité à Lausanne jusqu’en 1998, puis il travaille pour le journal Le Temps. Si la rubrique internationale reste sa spécialité, il signe également des chroniques «sciences et environnement»
En 2010, paraît Sale Temps pour le GIEC, ouvrage dans lequel Étienne Dubuis dénonce l’ambiguïté des prises de position sur la question climatique. «L’Occident vise d’une part à contrôler les ressources énergétiques et à dominer technologiquement le reste du monde. D’autre part, les pays du Sud, dans leur course au développement économique, focalisent leur attention sur l’argent que le Nord devrait leur verser pour compenser leurs émissions massives de gaz à effet de serre dans l’atmosphère», écrit-il. Sans minimiser le danger du réchauffement climatique, l’enfant de Vevey refuse que le sujet éclipse les projets urgents à mener contre d’autres fléaux sociaux tels que la faim et la pauvreté dans le monde
«L’Occident vise d’une part à contrôler les ressources énergétiques et à dominer technologiquement le reste du monde.»
Dans le souci de comprendre de près le parcours des migrant·e·s ouest-africain·e·s, cet ethnologue de formation s’est rendu en Italie en 2016. À l’issue d’une cinquantaine d’entretiens menés en Sicile, il publie un livre intitulé Les naufragés. L’odyssée des migrants africains. Cet ouvrage pousse la réflexion au-delà des chiffres et des mots abstraits couramment utilisés, tels que «vagues et courants migratoires», pour désigner les êtres humains qui frappent aux portes de l’Europe. «Je voulais leur donner la parole pour qu’ils nous parlent de leur vie et de leur parcours», explique le journaliste. Violences, exploitation, kidnapping, travaux forcés sont quelques-un des drames que les migrant·e·s ont confié au reporter soucieux de refléter leur rage de vivre dignement. Son ouvrage permet de mettre un visage sur les personnes que l’on accuse souvent de migrer pour des raisons économiques.