Pour plus d’illustrations d’Asia Alfasi à propos de la campagne 16 jours d’action contre la violence à l’égard des femmes, cliquez sur l’image. © Asia Alfasi/PositiveNegatives/Amnesty International
Pour plus d’illustrations d’Asia Alfasi à propos de la campagne 16 jours d’action contre la violence à l’égard des femmes, cliquez sur l’image. © Asia Alfasi/PositiveNegatives/Amnesty International

16 jours d'action contre la violence à l'égard des femmes La violence à l’égard des femmes réfugiées

Dans le cadre de la Journée internationale de l'élimination de la violence faite aux femmes (et la campagne 16 jours d'actions contre la violence à l'égard des femmes), Amnesty souhaite mettre en lumière le harcèlement subi par les femmes réfugiées. Actuellement, plus de 60 millions de personnes ont dû quitter leur domicile pour fuir la guerre ou la persécution. Environ la moitié d'entre elles sont des femmes, selon les estimations du Haut-Commissariat de l'ONU pour les réfugiés. Les femmes réfugiées sont davantage exposées à la violence, l'exploitation et au harcèlement sexuel.
Maryam

Maryam [pseudonyme] est originaire de Homs en Syrie. Elle est arrivée au Liban en 2013, elle y vit depuis avec sa famille. «Un de mes proches est décédé en août. La police a rédigé un rapport sur ma sœur et moi. Celui-ci contenait toutes nos informations: noms, adresses et numéros de téléphone. Après quelques temps, la police passait chez nous ou nous appelait pour qu’on sorte avec eux. Il s’agissait des trois mêmes officiers de police qui avaient rédigé le rapport. Parce que nous ne possédons pas de permis de séjour, les policiers nous ont menacées et nous on dit qu’ils allaient nous emprisonner si nous ne sortions pas avec eux.

Ceci a duré environ deux mois. Puis le propriétaire a voulu reprendre la maison et nous avons dû déménager. Nous avons changé de numéro de téléphone et n’avons pas donné notre nouvelle adresse à la police. Maintenant je n’oserais pas me présenter au poste de police. Si j’y allais, je sais que la police ne m’aiderait pas.

Une autre fois j’étais sur le trottoir d’une route où il n’y a pas beaucoup de voitures. Une voiture particulière est passée et le conducteur m’a offert de m’emmener là où je voulais aller. Je suis montée à l’arrière de la voiture. L’homme a commencé à me parler, et à me dire qu’il me donnerait de l’argent et m’emmènerait dans une belle maison et me rendrait tout ce que j’avais perdu. Il m’a demandé de m’asseoir à côté de lui. J’ai essayé de cacher ma peur et j’ai attendu qu’il y ait des immeubles et du monde pour lui demander d’arrêter la voiture pour que je puisse venir m’asseoir à côté de lui. Lorsqu’il s’est arrêté, je suis sortie de la voiture et j’ai appelé des gens de confiance pour qu’ils viennent me chercher. Il m’a demandé mon numéro de téléphone, je lui ai donné un faux numéro.

Le harcèlement (des femmes réfugiées) est un grand problème au Liban, qu’une femme soit célibataire ou mariée, elle se fait toujours harceler. C’est pour cela que nous avons peur pour nos enfants. J’ai une fille de 16 ans et je crains de l’envoyer au magasin le plus proche. C’est une souffrance partagée par tous les Syriens et toutes les Syriennes.»

Ada

Ada [pseudonyme] est originaire de Eziowelle au Nigeria. Elle est arrivée en Libye en mai 2015, avant de se rendre en décembre en Italie. «Au Nigeria, je n’allais pas à l’école. J’avais dix ans quand j’ai perdu mes deux parents, et mon oncle m’a emmené à Port Harcourt. Il avait des relations sexuelles avec moi tout le temps. Je suis tombée enceinte quatre fois et j’ai avorté les quatre fois. Mon oncle ne me laissait pas sortir, je devais rester dans le centre. Il possédait une arme et menaçait de me tuer si je parlais de ce qui s’était passé. À chaque fois qu’il avait une relation sexuelle avec moi, il me donnait de l’argent. La dernière fois que cela est arrivé, j’en ai parlé à une femme que je connaissais, et elle m’a conseillée de m’enfuir. Je lui ai donné mon argent pour qu’elle m’aide à m’échapper. Elle m’a donné un téléphone portable et une carte SIM, puis s’est arrangée pour que je parte en Libye avec d’autres personnes, en avril 2015.

Nous sommes arrivés en Libye en mai. Des hommes nous ont kidnappées et nous ont séquestrées dans une grande maison à Sabah. Ils nous ont demandé de l’argent. Je leur ai dit que je n’en avais pas. Ils avaient des relations sexuelles avec toutes les femmes, chaque nuit. Ils nous emmenaient dans une chambre séparée. Ils ont kidnappé plus de monde, et l’une des filles m’a demandé pourquoi je pleurais tout le temps. Je lui ai dit que je ne pouvais pas partir, et que cela faisait sept mois que j’étais ici. Elle a trouvé quelqu’un qui a pu payer pour moi et elle m’a conseillé de partir avec elle en Italie. Nous avons été transférées vers un autre endroit en voiture et avons marché pendant plusieurs heures en pleine nuit, avant de finalement arriver à une plage. Lorsque j’ai vu la mer et le bateau, j’ai eu peur. C’était un bateau gonflable en caoutchouc, et ils nous ont poussés en criant «allez-y, allez-y !» Nous étions plus de cent personnes dans le bateau et c’était très inconfortable.

Je suis arrivée en Italie deux jours plus tard. Je ne me souviens même plus comment nous sommes arrivés. Je pleurais lorsque les Italiens nous ont sauvés. Nous avons tous survécu. Lorsque nous sommes arrivés au port de Crotone, il y avait beaucoup de policiers. J’avais peur. Depuis là-bas, ils nous ont emmenés dans un autre centre en bus où je suis restée pendant quatre jours. Des soldats vérifiaient que personne ne s’échappe. Nous sommes partis en bus et sommes arrivés au centre d’assistance BARI. Dans les deux endroits, on m’a demandé mon prénom, mon nom et ma nationalité, mais mon esprit était ailleurs. Je n’arrivais même pas à me rappeler le nom de mes parents. J’ai raconté mon histoire et j’ai laissé mes empreintes digitales. Maintenant je recherche une protection, j’apprécie ma vie actuelle, plus personne ne me dérange, mais je pense souvent à mes parents. Je désire rester en Italie, je désire apprendre l’italien, j’apprécie beaucoup les Italiens.»