Le navire irlandais Eithne récupérant des migrants en mer, en juin 2015. © Irish Defence Force / Flickr
Le navire irlandais Eithne récupérant des migrants en mer, en juin 2015. © Irish Defence Force / Flickr

Groupe de contact pour la Méditerranée centrale La protection effective des réfugiés et migrants doit être la priorité

Communiqué de presse publié le 9 novembre 2017, Berne/Genève. Contact du service de presse
La protection des réfugiés et des migrants doit être au centre de la rencontre du Groupe de contact pour la Méditerranée centrale le 13 novembre à Berne. Les promesses de Simonetta Sommaruga restent toutefois vagues au préalable de cette rencontre. En raison de la situation catastrophique des droits humains en Libye, Amnesty International exige que la Suisse et l’Europe créent des voies légales sûres afin de protéger les migrants et réfugiés et qu’elles ne transfèrent pas leur responsabilité aux États africains qui se trouvent sur la route migratoire.

La ministre de la justice Simonetta Sommaruga a annoncé ces derniers jours que la Suisse allait examiner la possibilité d’accueillir des réfugiés particulièrement vulnérables en provenance de la Libye et qu’elle financerait des camps d’accueil au Niger, pays voisin de la Libye. Denise Graf, coordinatrice asile chez Amnesty Suisse, considère qu’il s’agit d’un «signe positif que Madame Sommaruga veuille sauver des réfugiés détenus dans d’horribles conditions en Libye. Mais les États européens doivent enfin présenter des mesures concrètes et étoffées pour protéger les réfugiés et migrants dans ce pays.»

Selon la communication officielle de la Suisse, pays hôte de ce sommet, le but de la réunion des ministres à Berne est «l’amélioration» de la protection des migrants et réfugiés en Libye. Mais il n’y a aucun indice qui laisse penser que les gouvernements européens envisagent de revoir leur approche actuelle, qui vise à renforcer les capacités des garde-côtes libyens pour empêcher les réfugiés et migrants de traverser la Méditerranée centrale et les retenir en Libye.

«La Suisse et l’Europe doivent maintenant agir», commente Denise Graf. «Dans un premier temps, l’Europe ferme ses portes aux migrants et réfugiés en provenance de la Libye, et maintenant elle veut discuter de leur protection. Mais c’est bien à travers leur collaboration avec les garde-côtes libyens que les États européens ont enfermé en Libye des milliers d’hommes, de femmes et d’enfants dans un pays où ils sont exposés à de terribles violations des droits humains, sans possibilité de recours juridique ou d’accès à l’asile. Les personnes détenues doivent être libérées et transférées dans un lieu sûr. Il faut pour cela des mesures immédiates et contraignantes, et non pas une "politique du sparadrapʺ pour se donner bonne conscience.»

Rançonnés, maltraités et torturés

Des observateurs internationaux et des organisations de défense des droits humains comme Amnesty International témoignent de façon unanime des conditions absolument catastrophiques auxquelles font face les migrants et réfugiés en Libye. «Les personnes qui sont interceptées en mer par les garde-côtes libyens sont toujours transférées dans des centres de détention après leur arrivée en Libye. Dans ces centres de détention, les réfugiés et les migrants sont exposés à la détention arbitraire, à la torture, à l’exploitation et à d’autres mauvais traitements, y compris la violence sexuelle», explique Matteo de Bellis, expert en migration auprès d’Amnesty International.

Matteo de Bellis a interrogé durant ces dernières années plusieurs centaines de personnes qui ont survécu à la Libye. «Les personnes maltraitées se comptent par milliers. En ce moment même, il est pratiquement sûr que des hommes et des enfants sont frappés, et des femmes violées», ajoute-t-il. «Il n’y a quasiment aucune femme migrante ou réfugiée qui ne soit pas exposée à la violence sexuelle en Libye.»

Les revendications d’Amnesty International:
  • Amnesty International demande aux États participants au Groupe de contact pour la Méditerranée centrale de mettre enfin sur pied des voies d’accès légales et sûres vers l’Europe, et demande à la Suisse d’y contribuer de manière significative : par exemple en mettant à disposition un nombre conséquent de places de réinstallation pour les réfugiés, en autorisant le regroupement familial à d’autres membres de la famille que la famille nucléaire, ou en accordant des visas humanitaires. Il est de plus important d’évaluer la possibilité d’accorder des visas d’étudiants, des visas de travail ou d’autoriser le sponsoring par des privés.
  • Toute collaboration migratoire avec la Libye ou d’autres pays de la région – sous forme de soutien financier, institutionnel, matériel, politique et/ou personnel – doit être redirigée avant tout vers la protection des droits humains des réfugiés et des migrants dans le pays.
  • La Libye doit libérer les réfugiés et migrants détenus et les évacuer des centres de détention. Les lois doivent être changées afin que les personnes qui entrent illégalement dans le pays et le quittent, ou qui séjournent de manière irrégulière dans le pays, ne soient plus criminalisées.
  • La Libye doit formaliser la présence du HCR dans son pays à travers une déclaration d’intention qui permette au HCR d’exercer son mandat sans restrictions, y compris les procédures de détermination de la qualité de réfugié et de réinstallation des réfugiés.